Rébellion 26 (29/09/2007)

Le numéro de septembre/octobre de Rébellion paraîtra début de semaine prochaine.

Alain de Benoist est à l'honneur avec un long entretien.

 

L'édito du numéro :

 

L'orientation communiste nationale de notre combat socialiste révolutionnaire

 

Le terme de « Communiste National », utilisé pour définir notre orientation politique dans le précédent éditorial de Rébellion, appelait certaines précisions. Nous ne sommes pas des « fétichistes des mots »,  les étiquettes ne nous intéressent pas et nous nous méfions de ceux qui veulent à tout prix nous ranger dans un de leurs cartons de classification politique. Nous trouvons vain de rechercher la reconnaissance officielle des politologues. Mais nous considérons important de présenter le contenu de notre démarche. Les questions de  vocabulaire sont parfois secondaires (certaines luttes peuvent aller vers le Socialisme Révolutionnaire  sans en employer le mot), mais révélatrices des confusions d’une époque ou d’une précision et efficacité redoutables, selon les cas. Nous savons que les mots n’ont plus aujourd’hui le même sens que jadis, que l’idéologie libérale a vidé de leur contenu originel nombre d’entre eux et impose ses propres définitions. Il  est dès lors nécessaire d’affronter ce nouveau langage officiel (la « novlangue »). Cela passe par une définition claire des idées, des concepts qui, dialectiquement, fondent notre action et en dérivent. Mais d’où proviennent  ces préjugés qui font hurler au retour du totalitarisme dès qu’est évoquée l’idée de Socialisme ? Après la chute du Bloc Soviétique, nous avons assisté à une criminalisation de toutes les pensées rebelles et au triomphe du capitalisme. A peine le mot de communiste était-il prononcé que l’on vous renvoyait à la face ses « crimes ». Si l’on osait évoquer l’idée que le libéralisme sauvage n’était peut-être pas le meilleur système pour atteindre le bonheur universel, on vous soupçonnait, dès lors, de vouloir rouvrir les goulags. Si en plus, vous vous hasardiez à évoquer le rôle positif de la patrie dans la résistance à la mondialisation, on vous traitait de « Rouge-Brun ». Ce degré zéro de la pensée est malheureusement loin d’avoir été dépassé, ces réflexes ont la vie dure dans les mentalités. Le système  a bien fait son travail en nourrissant pendant des années, des générations de jeunes, de ses propres valeurs individualistes et mercantiles ; aidé en cela, par les « repentis » soixante-huitards, reconvertis dans les affaires, et par les faux révolutionnaires gauchistes actuels. Ces derniers sont très intéressants à observer dans leurs contradictions, ils s’affirment souvent les héritiers d’un folklore révolutionnaire mais rougissent dès qu’on leur demande de se définir politiquement.  A l’exemple de la LCR, qui tente de gommer toutes ses références au communisme (jusque dans le projet, régulièrement évoqué dans ses congrès, de changer le nom de l’organisation. « Vous comprenez « Ligue Communiste Révolutionnaire » ça fait un peu peur au bourgeois quand même … ») et met en avant un discours des plus plats sur le citoyennisme réformateur. Devions-nous imiter de tels bouffons ? Non ! Nous avons opté pour une affirmation franche de notre orientation. Une définition nécessaire qui n’est pas un appel au dogmatisme. Nous avons trop souvent constaté que les minorités qui se veulent radicales s’enferment dans des discours grandiloquents, qui cachent mal leur absence totale d’action. Pour d’autres les idées sont inutiles, dans un monde où la rapidité de la communication virtuelle empêche de prendre le temps de raisonner. Cela n’est pas notre avis. Les mots comptent : « les idées s’améliorent, le sens des mots y participe ».  Il s’agit de donner un sens aux pratiques de notre engagement. A longueur de numéros de notre revue, nous désignons clairement notre ennemi : le capital, c’est-à-dire, un rapport social nous paraissant obsolète, devenu une pathologie grave pour le devenir de l’humanité dans sa diversité. Nous ne lui opposons pas une nouvelle utopie messianiste garantissant le bonheur universel. C’est le caractère fétichiste de la marchandise qui, en fait, est la nouvelle religion messianiste, « pleine d’arguties théologiques » comme l’écrivait Marx. Les voies, les possibles de l’histoire humaine sont multiples, sur tous les plans mais il n’y a pas une foule d’alternatives au règne sans partage de « la valeur en procès » ; la rupture réelle, pratique, radicale s’appelle le communisme. Ce terme, forgé par Cabet au XIX° siècle, a représenté une doctrine concurrente du socialisme, à l’origine. Du point de vue doctrinal, il recouvrait un contenu plus collectiviste que ce dernier, propre à un certain nombre de conceptions politiques souvent utopistes, du passé. Certains éléments se trouvent chez Platon, More ou Campanella par exemple. Le socialisme représentait quant à lui, un idéal de justice sociale, de souci de résolution de problèmes liés aux classes sociales, de répartition des produits du travail, d’harmonisation de l’association et de la liberté. Alors comment se retrouver dans ce foisonnement de termes et de conceptions ? En premier lieu, en rejetant le dogmatisme. Ce que fit correctement, Marx, à cet égard en critiquant parallèlement les conceptions utopistes des théories socialistes et communistes de son temps tout en reconnaissant la valeur de leurs évaluations critiques concernant la domination capitaliste. Ainsi, il rejettera aussi bien les fantaisies phalanstériennes du socialiste Fourier que les élucubrations du « communisme de caserne » de Cabet. Par là même, il ouvrait la voie à une démarche critique, scientifique et non scientiste (on connaît son ironie à l’égard des « marmites de l’avenir » concoctées par le positiviste Auguste Comte) à l’égard du capitalisme malgré, parfois, certaines concessions à l’esprit du temps fort empreint d’industrialisme, de technicisme. Mais même sur ce dernier point, sa pensée est plus  nuancée qu’il n’y paraît parfois (plus lucide que celle de Engels). En second lieu, en définissant le communisme pour ce qu’il est : l’objectif de rendre l’individu à lui-même, dans sa pratique. C’est une philosophie de l’individu pratique, vivant, agissant, tissant des liens sociaux et qui est en rupture avec la métaphysique de la subjectivité débouchant sur l’atomisme social et « l’arraisonnement du monde » dont la figure parachevée est celle du capital, domination sans bornes et sans voiles du règne de la valeur.

Ainsi que retiendrons-nous de ces termes ? Le socialisme est un terme fort général, recoupant des positions défendant la primauté du bien général sur l’intérêt égoïste de tel ou tel particulier. Nous insistons alors sur l’accent révolutionnaire que nous voulons lui imprimer pour le distinguer de ses variantes réformistes. Puis entrant dans le détail quant à la question du lien social, nous posons la question du rapport social : les individus sont livrés à la contingence des rapports de classes, de leur appartenance à celles-ci, dans une pratique liée au travail, largement dominée par la contrainte du salariat (tout est marchandise, de la force de travail aux produits du travail). Nous proposons alors, l’orientation communiste, ce qui a le mérite de dire la rupture avec le mode de production dominant qui est la domination de l’économie sur la pratique vivante des individus. La rupture ne peut être que le bouleversement des conditions actuelles de production et d’existence des individus (Marx envisageait des stades dans ce profond changement : « première phase de la société communiste, quand elle ne fait que sortir de la société capitaliste », et « phase supérieure de la société communiste » dans La critique du programme du parti ouvrier allemand.). Enfin, nous disons que la « lutte de classe est nationale, non pas dans son contenu, mais dans sa forme ». Ce qui ne signifie pas s’enfermer dans le cadre étroit de la Nation puisque nous pensons qu’il y a une identité européenne en devenir et que si celle-ci veut exister, elle ne pourra pas le faire en dehors d’une volonté socialiste révolutionnaire. Voilà le cadre d’action politique que nous désirons mettre en avant.

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