Petit entretien syndical... (15/11/2009)

Grace à un militant syndicaliste nous avons pu répondre à quelques questions pour un bulletin syndical niçois « altermondialise ». Les réponses ici exposées n'ont pas pu être totalement reproduites dans le bulletin faute de place...

Etre Socialiste Révolutionnaire Européen, qu'est-ce que c'est ?

Etre SRE, c'est s'inscrire consciemment dans la tradition prolétarienne de lutte née sur notre continent et qui s'est étendue ailleurs postérieurement. Mais c'est également concevoir un projet géopolitique européen alternatif à la domination unipolaire des Etats-Unis dont la classe dominante européiste est la docile servante. Par là même, c'est s'allier aux autres pays et peuples qui, dans le monde tentent d'échapper à la domination impérialiste occidentale. De plus, un mouvement social réellement opposé au capital ne pourrait prendre de l'ampleur qu'à une vaste échelle, en touchant les puissances principales européennes. A l'époque des grands blocs géopolitiques et géoéconomiques (USA, Russie, Inde, Chine, etc.), se replier sur la seule France, est une forme schizoïde de perception du réel, même si, par ailleurs, la lutte débute toujours ici et maintenant.

Sur votre blog* internet, vous mettez en exergue "contre la droite du système" / "contre la gauche du système", pouvez-vous développer ?

Les concepts de droite et de gauche en politique sont nés lors de la Révolution française et se sont transformés de manière complexe tout au long de notre histoire. Sans pouvoir développer, mais à titre d'exemple, rappelons que la gauche de la première moitié du 19° siècle désignait la bourgeoisie libérale opposée aux anciennes classes sociales devenues obsolètes (aristocratie, etc.). Marx s'est-il jamais dit de « gauche » ? Que l'on nous montre le texte ! Le capital s'accommode fort bien de la mascarade de l'alternance droite/gauche au pouvoir. Il faut rompre avec cette logique. Pour ce faire, il faut repenser le contexte de la lutte de classe au sein de la mondialisation que tout le monde - ou presque -  accepte. Mais ce qui est en jeu, ce n'est même pas la globalisation des échanges. En réalité celle-ci est inséparable de la mondialisation (on ne peut séparer mécaniquement les deux comme si un des deux aspects était neutre et bon en soi) que nous analysons comme étant le devenir-monde de la domination aliénante du capital. Dit autrement, le capital semble être devenu le seul Sujet de l'histoire humaine. Le concept d'altermondialisation (prôné par certains secteurs de gauche et même de droite) n'a, ainsi, pas de portée critique réelle (car non dialectique !). C'est accepter les termes du problème en l'état en leur donnant un autre habillage. La sortie du genre humain de l'aliénation n'a pas de sens économique justement ! Elle ne peut se faire que par le dépassement de l'aliénation de la pratique humaine à l'économie (dépassement qui a été rendu possible par la phase capitaliste et devient dès lors nécessaire). De fait, il ne pourrait se réaliser que par la régénération et le devenir de nouvelles identités collectives humaines et non par le mécanisme séparé des seuls échanges économiques aliénés. De la droite à la gauche y compris à leurs extrêmes, on ne veut surtout pas comprendre cela... En effet, altermondialisme signifie rigoureusement : un autre mondialisme ! Le socialisme n'a jamais été cela. La globalisation des échanges n'est jamais que l'extension/intensification de la domination de l'économie sur le lien social, ce que Marx a critiqué en premier lieu. Le mondialisme n'est que l'expression idéologique tendant à légitimer ce processus. Le communisme était pour Marx le développement libre et riche de sens de l'individualité humaine (« le règne de la liberté commence seulement à partir du moment où cesse le travail dicté par la nécessité et les fins extérieures ; il se situe donc, par sa nature même, au-delà de la sphère de la production matérielle proprement dite », donc au-delà des exigences de l'actuelle globalisation) et non l'uniformisation des peuples et des cultures. A l'opposé, concevoir comme étant inévitable la circulation tous azimuts d'hommes et de marchandises est le vœu le plus cher du capital.

Aujourd'hui le champ syndical est plus que limité, comment voyez-vous les choses ?

Evidemment que le champ syndical est limité, tout autant que la critique effective du capital ! Ce dernier a remporté une manche importante dans les péripéties de la lutte de classe, en particulier, à la suite de la disparition du bloc socialiste de l'Est européen vendu pour quelques deniers par sa classe dirigeante. A partir de cette perte de repères - à tort ou à raison - par le prolétariat mondial, la dynamique du capital n'a pas rencontré d'obstacle majeur y compris sur le plan géopolitique. Lorsque cela lui a été nécessaire, la bourgeoisie a entrepris des guerres impérialistes sanglantes sous couvert de droits de l'Homme (Irak, ex-Yougoslavie, Afghanistan, etc.). Pendant ce temps le prolétariat et ses organes de lutte (politiques et syndicaux) étaient laminés, et l'étaient d'autant plus que la gauche était intégrée depuis longtemps dans les rouages du système. Même les mouvements puissants de contestation (milieu des années 90 en France, par exemple) ne savaient pas réellement sur quoi déboucher, faute d'une finalité révolutionnaire consciente et radicale.

Comment être efficace et aller de l'avant ?

Nous n'avons évidemment pas de panacée universelle. Mais il faut toujours revenir aux aspects fondamentaux de la lutte de classe : articuler lutte immédiate (défense des salaires, de l'emploi, des conditions de travail, etc.) et stratégie à plus long terme visant à faire céder le verrou du rapport social capitaliste. Comment concrétiser cette articulation ? A) Par le principe de l'extension/communication des luttes sur le plan géographique. Ne jamais s'isoler dans l'entreprise pour ne plus en sortir. C'est malheureusement, souvent, cette stratégie du désespoir qui est adoptée. B) Par tous les moyens, la théorie révolutionnaire doit se répandre afin de fournir les principes d'action et de compréhension critique du réel. Ce dernier aspect est trop délaissé de nos jours. Le système possède un pouvoir de sidération/manipulation gigantesque qu'il faut contrecarrer. A Rébellion, nous essayons d'apporter notre contribution à cette tâche.

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