Entretien avec la rédaction de Rébellion : Pour un socialisme révolutionnaire européen ! (27/04/2015)

Jean Galié et Louis Alexandre de la rédaction de Rébellion font le point sur la situation de la revue et de l'OSRE pour la revue Eléments ( entretien réalisé par Michel Thibault).

Rébellion existe depuis 2002 sous sa forme actuelle. Quel bilan faites-vous de vos années d'existence ?

Louis Alexandre : En plus de 13 ans, nous n'avons pas chômé. Rébellion fait le pari de la créativité et de la réflexion collective. L'équipe de rédaction est constituée de quelques camarades présents depuis l'origine et d'une «jeune garde» qui représente l'avenir de notre démarche. Sans cette équipe, le journal n'existerait pas. Nous avons aussi ouvert nos colonnes à des «compagnons de route» comme les talentueux Thibault Isabel, David L'Epée, Charles Robin, Arnaud Borde, Lucien Cerise … Ils ont profondément enrichi notre revue. En conservant notre indépendance et notre autonomie, nous sommes parvenus à faire progresser notre démarche. Il apparaît que la ligne générale de Rébellion a acquis une certaine estime auprès de gens sérieux possédant un réel esprit critique.

Quels sont vos thèmes de prédilection ?

L.A : Notre démarche repose sur la réactualisation d'un socialisme révolutionnaire, nous abordons ainsi à notre manière des thèmes comme le localisme, l'écologie, l'autonomie, l'idée de communauté populaire, la Patrie française et européenne... Notre objectif est d'ouvrir des débats et de provoquer des ruptures avec la pensée unique. Pour nous, une revue qui ose et innove aura de l'audience. 

En 2014 l’idée socialiste et le projet européen, sont deux thèmes dévalorisés, n’avez-vous pas l’impression en les défendant d’aller à contre courant ?

Jean Galié : Certainement et nous nous en réjouissons. Ce n'est que la caricature d'un projet européen qui est dévalorisée aux yeux des peuples subissant les décisions de l'oligarchie technocratique bruxelloise tenant son pouvoir des gouvernements nationaux au service des intérêts du capital. Celui-ci dicte sa loi à ces gouvernements qui n'ont d'autre fonction que d'organiser la mise en coupe réglée des travailleurs. Cela passe par une institutionnalisation des impératifs économiques capitalistes, dirigée d'ores et déjà à l'échelle européenne et bientôt transatlantique. Les peuples européens ne seraient pas hostiles à leur rapprochement au sein d'un cadre politique et social porteur d'un destin commun. Ils savent que l'Europe a trop souffert des méfaits des guerres impérialistes ayant saigné notre continent au 20° siècle.

Pour cette raison, nous pensons que le socialisme (fin de l'accumulation capitaliste) est notre avenir. C'est également un signe adressé aux prolétaires des autres continents : nous ne sommes pas solidaires de l'offensive impérialiste occidentale dirigée contre eux. Nous disons aux prolétaires de tous les pays que le système capitaliste avec son paradigme de progrès productiviste n'est pas porteur d'émancipation humaine mais d'asservissement à la marchandisation de la nature et des facultés humaines (réification). Le socialisme du 21° siècle sera dans un premier temps un socialisme de réorganisation des peuples à l'échelle de continents ou sous continents selon des spécificités propres à des cultures et des identités diverses.

La mondialisation capitaliste répand le chaos social planétaire, déracine et déstructure le lien social. C'est la planification de la misère sociale et morale par la main invisible des quanta de capital s'affrontant sur le marché. Le socialisme planifie par des modes d'association multiples un destin commun possible libéré des entraves du processus de valorisation illimité (hubris économique). Pour cela, il faut une géopolitique du multipolaire et une géopoétique des peuples. Voilà une, certes, trop brève esquisse du socialisme du 21° siècle.

Quel est pour vous aujourd’hui la plus grande menace pour les peuples ?

L.A : L'ennemi n°1 des peuples est le capitalisme globalisé. C'est un système dont les bénéficiaires se retrouvent à la tête d'une oligarchie mondialisée. Sa logique mène à la déshumanisation de la société et à la destruction de la nature.

L’anti-impérialisme est une thématique récurrente dans la revue, pourquoi est-ce si essentiel ?

J.G : En effet, c'est une réponse frontale et radicale à l'idéologie dominante qui donne à voir sur la scène spectaculaire confinée à l'échelle nationale des combats de nains politiciens déguisés en titans se déchirant à propos de querelles domestiques. Au loin des dieux armés de drones font régner le "droit" et la "justice" universelles pendant que d'étranges barbares ourdissent des plans terroristes contre l'Occident ou au mieux nous font de la concurrence déloyale qui, si elle n'existait pas, laisserait s'épanouir le meilleur des mondes capitaliste possible.

En réalité, les luttes de puissance sur le plan géopolitique et géostratégique prennent de nos jours le sens d'affrontements impérialistes pour le pillage de la planète. Dès lors, nous faisons apparaître la face belliqueuse de la dynamique du capital qui n'en est pas une excroissance périphérique mais une condition de son extension planétaire. Cette lutte anti impérialiste est un moment de la lutte de classe.

Par exemple, il y a eu intervention impérialiste agressive occidentale en Ukraine récemment et en Serbie auparavant, pour ne parler que de l'Europe. Si nous tentons de sortir du capital, celui-ci nous fera la guerre, à une échelle nationale ou internationale, il faut en être conscient. C'est pour cette raison que les prolétaires doivent être internationalistes.

En plus de 10 ans la revue s’est constamment améliorée, dans le fond et la forme, d’où vous est venue l’idée du graphisme et de l’iconographie, qui est un marqueur fort de Rébellion ?

L.A : Nous avons entrepris un important travail de renouveau idéologique qui est arrivé à pleine maturité. Même si Rébellion est aujourd'hui une revue de qualité reconnue, nous ne nous reposons pas sur nos lauriers.

Nous avons la chance d'avoir un graphiste de grand talent, dont les influences viennent des artistes d'avant-garde et qui a donné une identité visuelle forte à Rébellion. Sa démarche futuriste révolutionnaire transmet l'énergie d'une pensée en action. Graphiquement, la volonté d'affirmer une contre-culture populaire et corrosive est une affirmation qu'une rupture est nécessaire même dans la forme d'expression de la contestation.

Quel sont les penseurs d’hier et d’aujourd’hui, dont vous vous sentez proches ?

L.A : Notre démarche emprunte le sillage de certaines «figures» incarnant pour nous des exemples. Des hommes et des femmes représentant un esprit de résistance et de rébellion. Je pense à Blanqui, aux communards, à l'artiste révolutionnaire William Morris, à l'irlandais James Connolly, aux arditi de Fiume, à Georges Orwell...

Au niveau des penseurs contemporains, je crois que nous pouvons évoquer Alain de Benoist, Jean Claude Michéa, Bernard Charbonneau, Costenzo Preve, Cornelius Castoriadis, Michel Clouscard, Alexandre Douguine...

Un penseur aussi intemporel que René Guénon a une influence toute particulière à nos yeux.

Vous avez créé une structure militante, l’OSRE, dans quel but et pour quelles activités ?

L.A : L'OSRE est la structure de soutien animant le réseau mis en place avec notre revue. Son rôle est de mener des campagnes ciblées (actuellement, le Traité Transatlantique ou notre campagne "Libérons l'Europe du Capital et de l'Otan") et d'être à l'avant garde du combat contre le système. C'est un engagement concret pour la construction d'une alternative. Les «Cercles Rébellion» organisent des activités sur le Sud-Ouest, la région parisienne, PACA ...

Vos projets futurs ?

L.A :Il reste une multitude de thèmes que nous souhaitons aborder d'un point de vue nouveau. Rébellion vous (et nous) réserve encore des surprises. Nous avons lancé une collection de brochures théoriques avec un hommage à C. Preve. Pour l'OSRE, l'enjeu est de faire vivre nos idées sur le terrain par une série de futures campagnes.

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