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23/09/2015

Sommaire du numéro 71 de la revue Rébellion

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Editorial : Pour une nouvelle radicalité !

Société : La vidéosurveillance - Argos Panoptès du monde moderne ( Marie Chancel)

Politique : Réflexion sur l'organisation de l'immigration de masse ( Patrick Visconti) 

Ecologie : Entretien avec Nicolas Fabre sur le retour à la terre. 

International : Entretien avec Dari Douguina du mouvement eurasiste. 

Histoire : Déboulonnons le XVIII ème Siècle ( David l'Epée)

Cinéma : Le Cinéma français et sa critique, entre "chien-de-gardisme" et schizophrénie ( Dany Colin) 

 

 

Commande  4 euros (port compris) :

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Communauté militante

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09/09/2015

Et revoilà les gaucho-humanitaristes dans la rue...

 

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Et revoilà nos gaucho-humanitaristes dans la rue pour clamer leur "solidarité" avec les migrants qui fuiraient la guerre en Syrie. Mais alors, pourquoi ne pas manifester contre nos politiciens, nos oligarques et nos médias qui ont promu la guerre en Syrie ! La France, comme d'autres pays membres de l'OTAN, a entraîné et armé ces soi-disant rebelles modérés dont on n'entend plus parler (1). A-t-on entendu la "gauche" critiquer cela ?

Non, nous les avons entendus faire de la propagande de guerre comme ils l'ont fait pour la Libye ; affirmer sans aucune preuve que le dictateur Assad gazerait son peuple. N'allez pas poser des questions sur cette attaque chimique du 21 août 2012, sinon on vous sortira la fameuse théorie de "la théorie du complot" (2). N'allez pas chercher à savoir si le peuple Syrien soutient Bachar-al-Assad, nos dirigeants savent mieux que les Syriens ce qui est bon pour eux. On est le pays des droits de l'Homme ou on ne l'est pas ! Toute ressemblance avec l'argumentaire de Jules Ferry pour justifier la colonisation n'est que pure coïncidence.

Il est sordide de voir ces Français qui ont voté Flanby s'enorgueillir de leur "solidarité" à l'égard de ces migrants alors qu'ils sont les complices des responsables de leur exil et de la mort de leurs proches. Mais qu'est-ce qu'un bobo sinon un être plein de bonnes intentions et de contradictions ?

La psychologie progressiste

Cette autosatisfaction, ce plaisir narcissique de se montrer comme celui qui compatit au malheur des autres, est tout simplement répugnant. On ne les entend jamais affirmer leur solidarité pour le peuple français qui voit sa situation se dégrader toujours plus. Le Français moyen, c'est un beauf et un raciste alors que le migrant, est par définition irréprochable.

« Les progressistes ont tendance à haïr tout ce qui renvoie une image de force, d'habileté et de réussite» (3). Ils détestent la civilisation occidentale, les Blancs de sexe masculin hétérosexuels et la rationalité. Leur sentiment d’infériorité les incite à s’identifier aux groupes qu’ils considèrent "stigmatisés". Lorsqu’il est sursocialisé, le progressiste est enfermé dans le carcan psychologique dans lequel il a été élevé et conditionné. Souhaitant se rebeller pour affirmer son autonomie, mais néanmoins trop faible pour s'opposer aux "valeurs" fondamentales de la société, « il s'empare d'un grand principe moral, en fait son cheval de bataille, et accuse ensuite l'ensemble de la société de le bafouer : égalité des races, des sexes, aide aux démunis, pacifisme, non-violence, liberté d'expression, protection des animaux et, plus profondément, devoir individuel de servir la société, et devoir de la société de prendre l'individu en charge. » (4). L’extrême gauche n’a rien d’anticapitaliste puisque sa revendication principale est « de demander au capitalisme d’être fidèle à ses principes » (5). Plutôt que de militer pour l’abolition du salariat, elle manifeste pour un marché du travail sans entraves.

La psychologie des progressistes est complexe et torturée, il en résulte une très faible faculté à raisonner. Le progressiste est incapable de voir autre chose que l’émotion immédiate : « Regardez ce couple d’homosexuels, ils sont malheureux de ne pas pouvoir avoir des enfants ! » Qu’importe si l’industrie s’empare du marché de la procréation et exploite de pauvres femmes dans le commerce de location d’utérus. « Et ce migrant qu’il a l’air malheureux lui aussi. Il faut l’accueillir ! » Qu’importe si cela sert la classe capitaliste en grossissant le nombre de consommateurs français tout en diluant et dissipant l’esprit de résistance et de subversion de la classe ouvrière (Francis Cousin). Et tant mieux si la culture française disparaît !

Pour penser, il faut prendre du recul dans l’espace et dans le temps. Mais ça, le progressiste est incapable de le faire.

Décidément, la "gauche" ne cesse de duper les individus "altruistes" en focalisant leurs revendications en faveur des minorités et des immigrés tout en occultant les responsables du chaos mondial et de l'exploitation capitaliste. L’extrême gauche du capital joue un rôle primordial dans la manipulation de la jeunesse. En faisant croire à l’existence d’une menace fasciste en France, elle permet au totalitarisme ultra-libéral de se développer sans heurts.

Depuis la révolution française, la gauche parlementaire n'a cessé de détourner le peuple du réel combat socialiste. Hier, Jules Ferry expulse les Jésuites pour faire dévier la critique sociale vers l'anticléricalisme (6). Aujourd'hui, l’extrême gauche du capital, en appelant à manifester pour les migrants, fait croire que l'Etat français et les oligarques sont hostiles à l'immigration, alors que l'afflux d'immigrés est pain bénit pour les capitalistes. Il suffit d’écouter les propos de l’ex-patronne du MEDEF, Laurence Parisot, pour s'en convaincre.

Jan Morvan

Notes :

(1) http://www.voltairenet.org/article188024.html

(2) Ecouter l’intervention d’Etienne Chouard sur ce point : https://www.youtube.com/watch?v=3gI_shQNZm0

(3) Voir les thèses 10 à 32 de l’ouvrage de Theodore Kaczynsky, La société industrielle et son avenir, Éditions de l'encyclopédie des Nuisances, 1998. https://dissibooks.files.wordpress.com/2013/09/avenirsoci...

(4) Ibidem.

(5) Le Complexe d'Orphée, Jean-Claude Michéa, Editions Climats, 2013.

(6) Voir à ce sujet la conférence d’Henri Guillemin, L'autre avant-guerre - 1871-1914, 2e épisode : La république des républicains : https://www.youtube.com/watch?v=giyAKxa4sKk&feature=y...

 

05/09/2015

"Je hais les indifférents" par Antonio Gramsci

 

gramsci_pd.jpg"Je hais les indifférents. Je crois comme Friedrich Hebbel que « vivre signifie être partisans ». Il ne peut exister seulement des hommes, des étrangers à la cité. Celui qui vit vraiment ne peut qu’être citoyen, et prendre parti. L’indifférence c’est l’aboulie, le parasitisme, la lâcheté, ce n’est pas la vie. C’est pourquoi je hais les indifférents.

L’indifférence est le poids mort de l’histoire.  C’est le boulet de plomb pour le novateur, c’est la matière inerte où se noient souvent les enthousiasmes les plus resplendissants, c’est l’étang qui entoure la vieille ville et la défend mieux que les murs les plus solides, mieux que les poitrines de ses guerriers, parce qu’elle engloutit dans ses remous limoneux les assaillants, les décime et les décourage et quelquefois les fait renoncer à l’entreprise héroïque.

L’indifférence œuvre puissamment dans l’histoire. Elle œuvre passivement, mais elle œuvre. Elle est la fatalité; elle est ce sur quoi on ne peut pas compter; elle est ce qui bouleverse les programmes, ce qui renverse les plans les mieux établis; elle est la matière brute, rebelle à l’intelligence qu’elle étouffe.

Ce qui se produit, le mal qui s’abat sur tous, le possible bien qu’un acte héroïque (de valeur universelle) peut faire naître, n’est pas tant dû à l’initiative de quelques uns qui œuvrent, qu’à l’indifférence, l’absentéisme de beaucoup. Ce qui se produit, ne se produit pas tant parce que quelques uns veulent que cela se produise, mais parce que la masse des hommes abdique devant sa volonté, laisse faire, laisse s’accumuler les nœuds que seule l’épée pourra trancher, laisse promulguer des lois que seule la révolte fera abroger, laisse accéder au pouvoir des hommes que seule une mutinerie pourra renverser.

La fatalité qui semble dominer l’histoire n’est pas autre chose justement que l’apparence illusoire de cette indifférence, de cet absentéisme.

Des faits mûrissent dans l’ombre, quelques mains, qu’aucun contrôle ne surveille, tissent la toile de la vie collective, et la masse ignore, parce qu’elle ne s’en soucie pas. Les destins d’une époque sont manipulés selon des visions étriquées, des buts immédiats, des ambitions et des passions personnelles de petits groupes actifs, et la masse des hommes ignore, parce qu’elle ne s’en soucie pas. Mais les faits qui ont mûri débouchent sur quelque chose; mais la toile tissée dans l’ombre arrive à son accomplissement: et alors  il semble que ce soit la fatalité qui emporte tous et tout sur son passage, il semble que l’histoire ne soit rien d’autre qu’un énorme phénomène naturel, une éruption, un tremblement de terre dont nous tous serions les victimes, celui qui l’a voulu et celui qui ne l’a pas voulu, celui qui savait et celui qui ne le savait pas, qui avait agi et celui qui était indifférent.

Et ce dernier se met en colère, il voudrait se soustraire aux conséquences, il voudrait qu’il apparaisse clairement qu’il n’a pas voulu lui, qu’il n’est pas responsable.

Certains pleurnichent pitoyablement, d’autres jurent avec obscénité, mais personne ou presque ne se demande: et si j’avais fait moi aussi mon devoir, si j’avais essayé de faire valoir ma volonté, mon conseil, serait-il arrivé ce qui est arrivé? Mais personne ou presque ne se sent coupable de son indifférence, de son scepticisme, de ne pas avoir donné ses bras et son activité à ces groupes de citoyens qui, précisément pour éviter un tel mal, combattaient, et se proposaient de procurer un tel bien.

La plupart d’entre eux, au contraire, devant les faits accomplis, préfèrent parler d’idéaux qui s’effondrent, de programmes qui s’écroulent définitivement et autres plaisanteries du même genre. Ils recommencent ainsi à s’absenter de toute responsabilité. Non bien sûr qu’ils ne voient pas clairement les choses, et qu’ils ne soient pas quelquefois capables de présenter de très belles solutions aux problèmes les plus urgents, y compris ceux qui requièrent une vaste préparation et du temps. Mais pour être très belles, ces solutions demeurent tout aussi infécondes, et cette contribution à la vie collective n’est animée d’aucune lueur morale; il est le produit d’une curiosité intellectuelle, non d’un sens aigu d’une responsabilité historique qui veut l’activité de tous dans la vie, qui n’admet aucune forme d’agnosticisme et aucune forme d’indifférence.

Je hais les indifférents aussi parce que leurs pleurnicheries d’éternels innocents me fatiguent. Je demande à chacun d’eux de rendre compte de la façon dont il a rempli le devoir que la vie lui a donné et lui donne chaque jour, de ce qu’il a fait et spécialement de ce qu’il n’a pas fait. Et je sens que je peux être inexorable, que je n’ai pas à gaspiller ma pitié, que je n’ai pas à partager mes larmes. 

Je suis partisan, je vis, je sens dans les consciences viriles de mon bord battre déjà l’activité de la cité future que mon bord est en train de construire. Et en elle la chaîne sociale ne pèse pas sur quelques uns, en elle chaque chose qui se produit n’est pas due au hasard, à la fatalité, mais elle est l’œuvre intelligente des citoyens. Il n’y a en elle personne pour rester à la fenêtre à regarder alors que quelques uns se sacrifient, disparaissent dans le sacrifice; et celui qui reste à la fenêtre, à guetter, veut profiter du peu de bien que procure l’activité de peu de gens et passe sa déception en s’en prenant à celui qui s’est sacrifié, à celui qui a disparu parce qu’il n’a pas réussi ce qu’il s’était donné pour but.


Je vis, je suis partisan. C’est pourquoi je hais qui ne prend pas parti. Je hais les indifférents.

11 février 1917

Traduit de l’italien par Olivier Favier.

 

De la misère en milieu étudiant ...

 

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1169 milliards d'euros, c'est la dette colossale souscrite par les étudiants américains afin de pourvoir suivre des études supérieures, plus élevée que le total des prêts contractés par les cartes de crédit ou l'ensemble des prêts automobiles. Ainsi trois-quarts des diplômés de tous âges qui se retrouvent débiteurs de 28 000€ à l'issue de leur cycle universitaire.

Mais ce n'est qu'une moyenne, trois années de droit au Boston Collège coûtent 152 000€ uniquement pour l'inscription. Cette situation résulte de plusieurs causes dont la première est l'augmentation des frais de scolarité du premier cycle universitaire (College) qui ont augmenté de 1 120% en 35 ans. Dans le même temps les fonds alloués par l'Etat fédéral ont chuté de 40% diminuant le rôle de la puissance publique dans le financement de l'université qui permettaient aux moins favorisés de faire des études supérieures et donc d'essayer de progresser sur l'échelle sociale.

Un système de bourses, créé en 1965, fut abrogé vers la fin des années 1970 par les républicains dont un fameux Ronald Reagan, qui considéraient que financer l'université revenait à gaspiller l'argent des contribuables. S'en suivit une privatisation rapide du système et la crise de 2008 qui réduisit encore d'un quart les financements publics.

La seconde concerne la folie des grandeurs des établissements universitaires qui pour capter des parts de marché, investirent sans compter dans des infrastructures dont des centres de loisirs ou des stades de football. Les endettements ont doublé en dix ans et la tentation fut donc d'augmenter les frais d'inscriptions et par ricochet la dette étudiante. Mais le plus inquiétant réside dans le fait que le niveau de qualification n'est pas valorisé en conséquence, une fois sur le marché du travail, ce qui est compréhensible. Seules les universités prestigieuses assurent encore un futur raisonnable, pour les autres c'est plus compliqué.

En 2013 près de la moitié des diplômés d'un premier cycle n'avaient pas réussi à décrocher un emploi. Malgré tout l'université américaine ne cesse d'attirer de plus en plus d'élèves ( 21,26 millions en 2015 soit 40% de plus qu'en 2000). Les plaintes d'étudiants affirmant avoir été mal informés par les universités ou les distributeurs de crédits se multiplient mais cette dette à l'inverse d'autres bulles ne comporterait pas de risques systémiques pour le milieu bancaire, l'Etat fédéral garantissant les prêts, les premiers lésés étant les consommateurs. En revanche l'argent que les étudiants consacrent à rembourser leurs études ne vient pas soutenir les investissements immobiliers. Ils sont plus de 40 millions à dépendre de l'organisme qui gère la dette étudiante, 11 millions de plus qu'il y a 7 ans.

Au Royaume-Uni, les universités étaient gratuites jusqu'en 1998, année où le gouvernement de Tony Blair introduit les premiers frais puis les augmentations progressives aboutirent à 4 100€ par an. Le gouvernement de coalition arrivé au pouvoir en 2010 les triplera afin d'arriver à 12 500 €. Néanmoins les étudiants n'avancent pas les frais universitaires qui le sont par l'Etat. Un fois le diplôme obtenu, ils doivent rembourser progressivement à partir du moment où leur salaire atteint 29 000 € par an en payant 9% de leurs revenus au-delà de ce seuil pendant un maximum de 30 ans. L'objectif est de laisser l'université accessible à tous quel que soit le niveau de revenu des parents, les étudiants étant égaux devant l'endettement. Pari risqué pour l'Etat car seul un quart finira par rembourser entièrement sa créance. L'augmentation des frais universitaires mène au paradoxe qui oblige les étudiants à payer plus, mais également l'Etat au profit des universités.

En France, en 2014, 36 % des 25-49 ans disposent d’un diplôme d’études supérieures à bac+2. Dans les établissements publics, c’est l’Etat qui prend en charge l’essentiel du coût des formations (soit en moyenne 10 000 € par étudiant et par an). Les droits de scolarité annuels, fixés pour l'ensemble des établissements publics ont été fixés pour l'année universitaire 2014-2015 à : 189,10 € pour les étudiants en Licence ; 261,10 € pour les étudiants en Master ; 396,10 € pour les étudiants en Doctorat ; 615,10 € pour les étudiants en Ecoles d’ingénieurs. À ces montants peuvent être ajoutés des frais supplémentaires pour des prestations spécifiques. Le coût des inscriptions dans les établissements privés, notamment les écoles de commerce, est sensiblement plus élevé (en général de 3 000 à 10 000 € par an). Ainsi on est encore loin des montants anglo-saxons et des aides, bourses et systèmes de péréquations permettent d'atténuer les inégalités. De plus en plus ce sont les frais indirects de la scolarité qui pénalisent la poursuite des études, loyer, coût de la vie et obligent les étudiants à travailler (74% en 2014) afin de participer au financement (pénalisant de ce fait les véritables demandeurs d'emploi). 

Quelques signes de changements commencent à se manifester. Les fac se transforment en Campus (les termes sont importants) ; les écoles prestigieuses se déclinent en province (ex. Science PO profitant aux passages de subventions importantes), des rapprochements et fusions s'opèrent comme dans les grandes entreprises, bref une "course aux armements" en prévision d'une extension du nombre d'étudiants, la France devenant un pays low cost pour une clientèle mondialisée et peu fortunée. Face au chômage, la tentation est grande de continuer des cycles avec l'argument que l'augmentation du niveau d'instruction atténue le risque. La réalité est surtout que l'on gagne du temps en attendant une "divine surprise", création de nouveaux secteurs d'activité, rebond de l'économie, baisse démographique. Elles servent d' amortisseur statistique à l'augmentation constante du nombre de demandeurs d'emploi. Actuellement 23% des jeunes  de 25 ans sont sans travail et les métiers les plus recherchés sont sans qualification ou à faible qualification. Cherchez l'erreur.

 Fabrice Lehénaire