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04/02/2008

Contre le libéralisme sauvage

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Contre le libéralisme sauvage
Pour un Socialisme Français

 
(Article paru dans Rébellion n°27 Novembre-Décembre 2007 )

Ils sont militants, diffuseurs, collaborateurs de notre rédaction. Ils sont la force de Rébellion. Ils expliquent leurs motivations et leurs espoirs dans notre enquête sur ceux qui font vivre la démarche socialiste révolutionnaire. Un de nos camarades parisiens, nous donne sa définition de ce que devrait être une critique radicale du libéralisme.


Cibler l’ennemi, le circonscrire, le définir précisément, telle est la difficulté tant il semble être protéiforme de nos jours. Passé maître dans l’art du camouflage, il change de peau au gré de ses envies un peu comme un caméléon au cœur de la forêt profonde. Pourtant Carl Schmitt nous a montré la voie dans ses nombreux écrits (1). La dialectique « ami/ennemi » n’est pas un vain mot. En politique, il est nécessaire de l’appliquer à la lettre : « dis-moi qui sont tes ennemis, je te dirai qui tu es ». Nous pensons que ce rôle sied à merveille à la doctrine libérale du capitalisme moderne qu’on essaye par tous les moyens de nous imposer. Avaler une couleuvre n’est jamais chose facile surtout lorsque l’on s’y refuse. Et nous nous y refusons.


Nos sociétés «  européennes avancées » sont des sociétés libérales dans lesquelles le socialisme n’est pas et n’a jamais été, j’entends le vrai socialisme. Vouloir redonner ses lettres de noblesses à un mot tant galvaudé est toujours délicat. Surtout lorsque l’on connaît la probité des gens qui s’en réclament de nos jours. Pour prendre un exemple, les « socialistes » du P  « S » actuels ne sont rien d’autre que des laquais du libéralisme. Ils n’ont plus rien de socialistes. Il faut donc dénoncer sans relâche l’usurpation qu’ils font du mot socialiste. C’est là un des problèmes majeurs de notre temps. La signification même de certains mots a changé. Or, il est absolument nécessaire de s’accorder sur la définition de chaque mot employé sous peine de ne plus se comprendre. C’est donc à un véritable travail de redéfinition du vocabulaire politique que nous devons nous atteler. Pour commencer, une critique serrée de la société dite libérale est nécessaire pour dire ce dont nous ne voulons pas. Après quoi, nous pouvons passer aux propositions toujours délicates à formuler tant l’avenir semble fortement compromis. Aujourd’hui, nous ne sommes plus maîtres de la situation car nous ne sommes plus maîtres de nos vies. Il faut, et c’est urgent, reprendre le contrôle de nos vies. L’Histoire n’est pas encore finie contrairement à ce que martèlent sans cesse nos « amis » américains. Tout simplement car elle est sans cesse à réinventer. Non linéaire, l’Histoire est toujours ouverte. Non, la société libérale n’a pas encore gagné la partie ! Non, les peuples rebelles n’ont pas encore dit leur dernier mot ! Non les hommes libres ne baisseront pas les bras ! La vie est un combat sans cesse recommencé. Qu’attendons-nous pour remettre les compteurs à zéro ?

L’authentique socialisme français


Reprenons le débat trop tôt faussé par le libéralisme. Souvenons-nous des grands anciens, ces socialistes français, qui nous montrent la voie à suivre (2). A commencer par Charles Fourier (1772-1837) «  qui voua au commerce une haine implacable, n’y voyant que mensonge, fraude, accaparement et spéculation ! ». Pour lui, « le travail doit être source de satisfaction spirituelle » et « le commerce être tout bonnement supprimé ». Pierre Leroux (1797-1871), l’inventeur du mot « Socialisme » fut quant à lui, l’un des penseurs les plus originaux du XIX° siècle. Dans ses ouvrages, il fustige « l’illusion démocratique » et « tout en stigmatisant l’individualisme, c’est sur l’individu qu’il compte pour la construction du socialisme et qu’il fonde la souveraineté ». Auguste Blanqui (1805-1881) fut plutôt un « tacticien de l’insurrection urbaine ». Il passa plus de 33 ans en prison. « Les révolutions, écrivait-il, c’est l’unique soulagement de l’âme ulcérée des travailleurs, le seul répit à leurs douleurs morales, l’instant toujours trop court qui relève leurs fronts courbés dans la poussière ». Selon lui, « il ne doit pas rester un fusil aux mains de la bourgeoisie ». « Il faut supprimer la presse bourgeoise, évincer leur église et rompre radicalement avec la classe politique, notamment les libéraux et les pseudo-socialistes ». Il n’hésite pas à écrire que « le parlementarisme n’est qu’un ramas de nullités et d’égoïsme où priment quelques artistes de la parole et certaines habiletés malfaisantes ». Au final, « la tâche essentielle de la Révolution sera d’assurer au peuple l’éducation intégrale car, selon lui, l’oppression est fille de l’ignorance ». Proudhon (1809-1865) reste quant à lui l’inestimable auteur de la célèbre apostrophe « la propriété, c’est le vol ». Selon lui, « l’autorité sans liberté qui discute, résiste ou se soumet, est un vain mot ; la liberté, sans une autorité qui lui fasse contrepoids, est un non-sens ». A l’idée de progrès, il préfère « la recherche constante d’équilibres nouveaux ». Comment ne pas évoquer aussi sa fameuse théorie de la « force collective » supérieure à l’addition des forces individuelles qui la composent et « sa division de la société en paysans enfin maîtres du sol, en une myriade de petits fabricants et artisans et pour finir en compagnies ouvrières intelligentes et fières ». Proudhon fut, en tant que socialiste français, un adversaire déclaré du « communisme » bureaucratique et totalitariste qui ne ferait à ses yeux que substituer un nouvel esclavage à l’ancien. Toujours selon Proudhon, « chaque homme doit jouir des mêmes droit à condition de remplir les mêmes devoirs ». Il ne faut pas oublier que c’est à lui que l’on doit une grande part du principe de l’autogestion ouvrière, partagé tout autant par le syndicalisme révolutionnaire que par l’anarchisme. Il rédigea même une petite brochure intitulée « de la capacité politique des classes ouvrières » que l’on peut qualifier de véritable catéchisme du mouvement ouvrier français. Georges Sorel (1847-1922) fut le grand théoricien du syndicalisme révolutionnaire, notamment à travers son maître ouvrage « Réflexions sur la Violence », où il compare le phénomène de la grève générale aux élans d’une guerre. Jean Jaurès fut l’héritier politique des « socialistes français » dans leur ensemble, lui qui refusa jusqu’au dernier moment le suicide de l’Europe. Il paya de sa propre vie son combat pacifiste. Et l’on se prend à rêver de ce qui serait advenu si les foules l’avaient suivi plutôt que de répondre aux sirènes du nihilisme de la Grande Guerre. Nous pouvons aussi citer des auteurs majeurs venus du monde anglo-saxon, au premier rang desquels George Orwell et Christopher Lasch. Mais, amis lecteurs, attention. Il ne s’agit pas de vivre dans la nostalgie d’une époque bénie ou d’un passé révolu. Ce bref rappel doit nous servir  de base en vue d’une contre-attaque sévère des lignes libérales ennemis. Il s’agit de s’inspirer de nombre de ces réflexions pour en faire vivre les principes. Le socialisme français a évolué, il s’est adapté. Il doit retrouver dès à présent tout son mordant pour propulser l’ensemble de la société française vers l’avenir.

Le libéralisme, fils de la bourgeoisie
La bourgeoisie possédait depuis toujours le pouvoir économique. Elle est fille de la banque. Mais l’argent seul ne suffit pas. Il faut pouvoir l’utiliser à sa guise. Avant de pouvoir donner libre cours à toutes ses fantaisies, un obstacle de taille se présentait sur son chemin : le pouvoir politique. Avec la chute de l’Ancien Régime et la disparition de l’aristocratie traditionnelle, ce fut chose faite. La bourgeoisie s’attaqua ensuite à toutes les classes de la société. Elle répandit partout l’appât du gain. Et en fin de compte, elle opéra une véritable « révolution des mœurs », l’argent devint le seul référent.


 Ce système s’incarna dans un pays : les Etats-Unis. La fascination de nos élites pour « l’american way of life » est tout simplement consternante. Elles veulent imposer ce modèle à la France et l’Europe. Le libéralisme maximaliste de la société américaine, c’est la guerre de tous contre tous. Société de déracinés qui s’est construite contre l’Europe, l’Amérique est aussi la société de tous les racismes. Car, ce n’est pas en agrégeant des communautés disparates que l’on construit un peuple. Ainsi les différentes communautés qui séjournent sur le sol américain s’ignorent-elles totalement. Elles vivent parquées dans des quartiers, ou plutôt des ghettos, les unes à côté des autres et sans aucun contact. Le seul lien qui les unit est l’argent. Aux Etats-Unis, le dollar est roi et seule la réussite matérielle importe. Savoir qu’une partie non négligeable de la jeunesse de France a pour modèle les States est inquiétant. La sous culture consumériste US se répand dans le monde comme un torrent de boue…
 
Le Libéralisme contre les peuples
Détruire les peuples, tous les peuples de la planète, tel semble être l’éternel mot d’ordre du libéralisme. Pourquoi s’attaquer aux peuples avec un tel acharnement ? Tout simplement parce que les peuples sont beaucoup trop dangereux pour la « nouvelle idéologie ». Ils peuvent résister passivement. Ils peuvent lutter activement. Ils peuvent se rebeller, se révolter. Ils peuvent même vaincre. L’histoire est là pour le prouver.

Une mosaïque de communautés, que l’on tente de créer en France, en est quant à elle totalement incapable. Car la communauté qu’il faut bien distinguer du peuple est impuissance par essence. Elle est constamment sur la défensive. Elle s’affronte à d’autres communautés ennemies. Mais elle est bien trop faible pour lutter contre « le Tout Libéral ». Et que dire de l’agrégat d’individus ? L’homme seul est profondément vulnérable et surtout il est totalement inoffensif. Perdu dans des immenses mégalopoles sans liens avec les autres humains et la nature. Le prochain objectif du libéralisme sera la destruction de la famille (ultime refuge contre l’atomisation de la société) et des derniers vestiges du « monde d’avant » (campagnes, quartiers populaires, solidarités du quotidien).  

La société libérale, c’est la société
du spectacle et de la consommation
La société libérale est une société spectaculaire. Tout y est spectacle, en permanence, chaque jour, chaque heure, chaque minute, chaque seconde, partout et nulle part à la fois…


Le Spectacle c’est le grand remue ménage du rien, c’est le vide intersidéral de la pensée, parfaitement incarné par le phénomène télévisuel que nous connaissons bien aujourd’hui. La réalité n’existe plus dans la société libérale avancée. On y vit par procuration. Les autres, les héros du petit écran vivent pour nous. Alors à quoi bon bouger de son canapé. Le sentiment du tragique, celui de pouvoir contrôler sa propre destinée, de pouvoir l’influencer, ont disparu depuis fort longtemps. Tous ces signes, tous ces chiffres que sont les images ne sont pas neutres. Ces dernières agissent sur nos cerveaux comme un leitmotiv : laisse-toi faire et consomme. Tel pourrait être le mot d’ordre de la société de masse dans laquelle on vit. La consommation, ce sont ces affreuses grandes surfaces qui s’alignent à perte de vue dans les zones commerciales on ne peut plus glauques, ces queues à n’en plus finir aux caisses des supermarchés, ces caddies remplis à ras bord d’objets inutiles tous plus chers les uns que les autres, ces voitures alignées devant des pompes à essence inertes…


La consommation, c’est le règne de l’inutile et de la vitesse. C’est le triomphe du vide, c’est le désespoir le plus total, c’est la dépression, c’est le suicide des jeunes à qui la société n’offre rien d’autre que le pouvoir d’achat, c’est ce monde sans aucune issue possible. C’est la solitude démentielle des grandes villes et la naissance d’une race hybride, mi-robot, mi-esclave…

Ce que nous voulons
De même que nous refusons l’uniformisation au sens large, nous refusons le port de l’uniforme obligatoire : jean, basket, ipod, coca et macdo. Nous ne voulons pas non plus nous plier aux diktats de la mode en vigueur. Nous rejetons en bloc la post-modernité décadente de la société occidentale. Dans un même ordre d’idées, nous dénonçons l’adoption générale du « système des objets » car avant de posséder des objets ce sont bel et bien les objets qui nous possèdent. Nous n’acceptons en aucune manière le règne sans partage de la « médiacratie » et du système publicitaire qui l’accompagne. Nous dénonçons cette agression permanente et totale des images et des slogans qui pervertit l’humanité. Nous récusons en bloc l’ « idéologie du Même » où tout le monde est interchangeable : les mêmes envies, les mêmes désirs, les mêmes destins, les mêmes fatalités, les mêmes fins. Nous revendiquons le droit d’être différents, de penser différemment, de vivre d’une autre manière.


Nous refusons pour autant de baisser les bras. Nous ne voulons plus de l’idéologie libérale niveleuse et égalitariste par en bas. Nous rejetons la fatalité. Nous réclamons le droit de vivre, tout simplement. Pour cela, nous appelons de nos vœux une véritable Démocratie Organique et non cette vague soupe parlementariste que l’on nous sert tous les jours au « vingt heure ». Nous voulons que le peuple reprenne le pouvoir par la voix référendaire. Nous voulons que les élus du peuple habitent les quartiers populaires. Nous voulons des hommes courageux pour nous représenter, des hommes qui montrent l’exemple, des hommes sans ambitions personnelles, des hommes modestes. Nous dénonçons l’inutile domination des partis et de leurs hommes liges. Dans un même ordre d’idées, nous vomissons le règne de l’argent et tous ceux qui s’y laissent prendre. Nous nous érigeons contre le système boursier, contre les patrons du Cac 40, contre l’actionnariat, contre le dieu dollar et contre la religion du tout profit. Nous ne voulons pas d’une planète morte, de ce « cauchemar climatisé » dont parlait Henry Miller. Nous condamnons le saccage des forêts, le tout voiture, le tout avion, la pollution qu’engendre la société de consommation.


Nous nous battons pour le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Nous appelons de nos vœux un monde multipolaire avec des ensembles civilisationnels fiers de leurs spécificités et identités. Nous affirmons que dans ce « Nouveau Monde », chaque homme « pensera global et agira local ». Nous réclamons haut et fort l’application généralisée, partout et en tout lieu du « Principe de Subsidiarité ». En conclusion, nous récusons toutes les idéologies de masse chères au défunt vingtième siècle : libéralisme, communisme bureaucratique et nazisme. Nous désirons un véritable socialisme, porteur d’espoir pour tous les peuples. Nous voulons des hommes libres. Nous voulons un avenir pour nos enfants. Nous rejetons la guerre et le terrorisme. Et par-dessus tout, nous rejetons la société libérale qui nous a vu naître…


Jip de Paname


NOTES
1>Carl SCHMITT, La notion de politique, Théorie du Partisan, Calmann-Levy, 1972
2>Dominique BIHOREAU, La pensée politique et sociale en France au XIX° siècle, Ellipses, 1995.

28/10/2005

Pour une ligne de front anticapitaliste

[Rébellion n°12 Mai/Juin 2005]

Ceux qui nous ont lu correctement, savent qu’à Rébellion nous goûtons peu les pièges du paradis « démocratique » du capital et sommes peu enclins à participer aux initiatives des vastes rassemblements interclassistes dont celui-ci a besoin pour se survivre à lui-même (depuis les Fronts populaires du passé, en passant par l’union de la Gauche jusqu’au conglomérat actuel de l’altermondialisme et de l’idéologie citoyenniste). Ces impasses historiques constamment réactualisées par le discours sur l’opposition droite/gauche, semblent néanmoins avoir du plomb dans l’aile pour la période qui s’annonce. Malgré tous les efforts déployés par les officines du système afin de maintenir un rapport fantasmatique à la réalité sociale (spectre du fascisme, du terrorisme, de l’islamisme etc.) afin de paralyser toute critique radicale du capital, les clivages politiques habituels commencent un tout petit peu à se fissurer. Déjà la question référendaire traverse et divise tous les courants politiques traditionnels, ce qui en soi n’est pas une grande surprise. Ce qui est plus significatif est le développement de la discussion sous-jacente à ce phénomène : quel modèle de société adoptons-nous ? De quelle Europe parlons-nous au sein d’un monde soumis au processus de mondialisation ? Par ricochet toutes les questions en viennent à se rejoindre et le lien est clairement fait avec la politique mondiale dominée par les Etats-Unis.

La référence exclusive à la libre concurrence dans le projet de constitution européenne (plus de 140 fois dans le texte) à laquelle plus rien ne pourrait ainsi échapper met en exergue le choix de société sur lequel il faut se prononcer. Chacun est ainsi mis au pied du mur, à tel point qu’au sein même de la « droite », certains hommes politiques se déclarant néanmoins libéraux en viennent à contester cette hégémonie définitive et sans partage de l’idéologie ultra libérale. A gauche, certains tirent la leçon de la pratique sociale démocrate au pouvoir, puisque celle-ci s’est globalement résumée- comme on aurait dû s’y attendre- à une gestion des affaires du capital, c’est-à-dire des délocalisations et de la mondialisation, assortie de bons sentiments et de discours à prétentions humanistes pour faire accepter la triste réalité. En conséquence, l’altermondialisme apparaît au mieux comme une énième illusion concernant la façon d’humaniser le capitalisme et au pire comme une stratégie de ce dernier afin de contenir le mécontentement à son égard. Dans cette optique, la critique radicale des présupposés du système revient au devant de la scène avec un sérieux que l’on avait oublié depuis longtemps.

Pour ce qui concerne le thème de l’Europe, même si les clivages subsistent entre souverainistes et européistes, la question posée donne à réfléchir sur notre destin de civilisation et sur notre ancrage en celle-ci. En filigranes apparaît l’interrogation sur les limites de l’Europe, avec la perspective mondialiste d’adhésion de la Turquie. Nul ne se présente sérieusement comme étant indifférent à la richesse du patrimoine européen et de surcroît une conscience commune des liens unissant les peuples européens commence à se dessiner. C’est même pour défendre l’identité de l’Europe que certains se déclarent hostiles à la Constitution (position de Rébellion bien évidemment). Son cadre libéral disloquant les quelques acquis sociaux obtenus de longue lutte ne saurait satisfaire ceux rejetant l’hégémonie du capital. Face à la volonté de la bourgeoisie de sacrifier l’Etat Nation qui lui avait servi de cadre pour se développer (mais aussi de cadre de résistance de la part des travailleurs), la nostalgie à l’égard de ce vieux schéma peut apparaître comme n’étant plus de mise et induire une recherche de voie originale dans l’optique de la remise en question du système.

Enfin, les évènements internationaux où il ne faut pas être grand clerc pour saisir l’offensive mondiale des Etats-Unis afin de dominer la planète, donne à penser sur le poids de l’Europe dans le jeu géopolitique. Là également, le texte constitutionnel est sans ambiguïté, puisqu’il arrime totalement la politique européenne aux intérêts otanesques, soit, en clair, aux intérêts de la puissance étasunienne. Cela permet, en fonction de tout ce que l’on peut observer dans le monde (occupation de l’Irak, diabolisation des pays réticents, encerclement de la Russie) de se déterminer par rapport à l’hyperpuissance et de désigner l’ennemi : la plus grande puissance capitaliste du monde à l’égard de laquelle l’Europe ne peut que s’opposer conjointement avec d’autres peuples en lutte. Mais cela ne pourra réellement se faire qu’en montrant l’exemple d’un autre type de société que nous qualifierons de socialiste.

Ces axes que nous venons d’esquisser nous semblent déterminants pour l’avenir. Certaines convergences, malgré les désaccords sur tel ou tel point, sont à l’ordre du jour, échappant ainsi au carcan idéologique que le pouvoir impose subtilement à tout un chacun. En particulier, la dichotomie droite/gauche est-elle largement désuète eu égard aux fondements sur lequel elle était sensée reposer. Certains en sont venus à raisonner comme si s’affrontaient deux essences éternelles incarnées par le processus historique, oubliant de ce fait que la politique a une dimension d’artifice consistant à redéfinir en permanence un fragile équilibre entre des pratiques humaines souvent contradictoires. On doit effectivement faire des choix, mais pas entre des essences supra humaines. Il s’agit d’évaluer les répercussions de tel ou tel choix politique quant à ce qui concerne le bien commun. Le libéralisme tous azimuts est désastreux à tous égards, l’immigration qui l’accompagne en est un effet collatéral par exemple. Inutile de se cacher la vérité en s’abritant derrière de fumeux principes, véritables essences métaphysiques appliquées abusivement à la politique. Là-dessus des esprits sensés peuvent bien s’accorder. De fait, on commence à comprendre cela et se présente ainsi l’opportunité de faire éclater les clivages dépassés au sein de l’univers politique. Une ligne de front se dégage peu à peu du sein des brumes idéologiques : c’est la ligne de front anticapitaliste débarrassée des vieux oripeaux qui jusqu’à maintenant ont stérilisé toute tentative de venir à bout du processus de la domination de la valeur dans la pratique sociale des hommes.