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13/01/2015

Les Nanotechnologies : Aux frontières du réel ?

 

Pièces et Main d’Oeuvre, nanomonde, RFID, nanotechnologies, Julien Teil,

 

La science peut-elle repousser indéfiniment les limites du possible ? Cette question, nombre de têtes pensantes du système se la posent. Sans souci des conséquences, elles poursuivent le but de dépasser les limites que la Nature nous fixe. Leur but : donner un nouvel espace de développement pour le capitalisme. Même si cela doit conduire à la destruction de l'Humanité.

Le collectif «Pièces et Main-Oeuvre» mène depuis dix ans un travail d'analyse et d'information sur les applications des nouvelles technologies par le système. Nous présentons ici une synthèse de ce travail pour nos lecteurs et nous les encourageons à découvrir l'ensemble de leurs travaux. ( article paru dans le Rébellion 47 ) 

Les nanos à l'assaut du monde...

Mais qu'est-ce que les nanotechnologies ? Le préfixe «nanos» ("nain" en grec ancien) fait référence au milliardième de mètre, soit environ un cent millième de l'épaisseur d'un cheveu. Né en 1981 dans le laboratoire d'IBM de Zurich, le microscope à effet tunnel est le premier outil à avoir permis l'observation de la matière à l'échelle de l'atome, entre 0,2 et 0,3 nanomètre. A l'aide d'une sonde métallique, il «palpe» la surface à étudier et permet une manipulation des atomes.

Les nanotechnologies concernent la fabrication et la reproduction de mécanismes et de produits élaborés de toutes pièces à partir d'atomes ou de molécules. Le matériel génétique et la matière inerte deviennent ainsi un jeu de legos manipulables à volonté, dans les nanos-usines du futur. Exactement comme la nature produit des arbres, des montages et des être vivants avec de la matière première moléculaire. Il ne s'agit plus de refaçonner les éléments puisés dans l'environnement mais bel et bien d'instaurer une nouvelle nature : des nanorobots capables d'auto-reproduction et programmés pour assembler atome par atome les matériaux . La nanotechnologie est à la matière inerte ce que la biotechnologie est au vivant. La recherche sur les nanotechnologies s'intéresse actuellement surtout aux molécules de carbone, mais elle pourrait s'étendre à la table complète des éléments. Entre dix et cent nanomètres notamment, la nature réalise de nombreuses machines moléculaires. D'où la continuité entre bio et nanotechnologies, aboutissant aux nanobiotechnologies. Les chercheurs savent déjà manipuler des bactéries pour leur faire produire des substances particulières, notamment médicamenteuses. En manipulant atomes et molécules un à un, on revient au stade antérieur à l'apparition de la vie. Autrement dit, si je peux rassembler comme je veux atomes et molécules, je peux créer une autre vie : virus artificiels, connexions entre nerfs et ordinateurs, transparence absolue du génome, machines microscopiques et donc invisibles, biopuces fournissant instantanément des informations sur notre patrimoine génétique et notre état de santé ...

Quand l'oligarchie recherche à survivre

Les applications des nanotechnologies sont déjà présentes dans notre vie quotidienne. L'informatique, la téléphonie et la RFID ( « Radio Frequency IDentification » - identification sans contact par des puces électroniques. ) connaissent déjà les retombées des recherches sur cette nouvelle technologie. Même si certaines applications des nanos sont futiles (comme l'électro-ménager "intelligent"), d'autres sont plus inquiétantes et révèlent les objectifs de ceux qui les financent.

Déjà, des laboratoires fournissent au complexe militaro-industriel des nouvelles armes de destruction ciblées. Des nanos dronesi poursuivant leur cible sans le moindre répit laissé aux «armures» protègent et décuplent le potentiel physique des soldats d'élite, cet arsenal est déjà en possession des Etats-Unis. Couplé aux nouvelles technologies du fichage (rendu possible par les puces RFID ou la biométrie), on comprend vite que le système a la capacité de mettre en place un techno-totalitarisme encore plus difficile à combattre. Les personnes qui tentent de nous alerter sur ce risque sont souvent traitées de paranoïaques, mais les « paranos » peuvent aussi avoir raison...

Cette technologie est donc aux mains des puissants, de l'Oligarchie qui tente d'assurer sa survie. Elle compte bien en tirer de futurs profits, ces nouvelles sciences du XXIe siècle – génétique, nanotechnologie et robotique- pourraient bien créer un masse gigantesque de nouvelles richesses, peut-être de l'ordre d'un million de milliards de dollars. Cette prodigieuse création de richesses, accompagnée des autres impacts des nouvelles technologies, débouchera dans le rêve du capitalisme sur des changements infiniment plus importants que ceux des deux premières phases de la révolution industrielle. L'investissement privé dans le domaine est déjà colossal, mais pas seulement. Le gouvernement américain, de son côté, injecte chaque année 600 à 700 millions de dollars dans ce secteur. L'Union Européenne (avant la crise) allouait 700 millions d'euros à des groupes de recherche sur la question pour permettre de rester dans la course.

Circulez, il n'y a plus de débat possible …

Le fait de lâcher dans la nature des techniques capables de modifier totalement le vivant est plus qu'inquiétant. On n'en connaît pas encore les retombées possibles et tout est fait pour les minimiser. Nous pensons pour notre part que cela est d'autant plus surprenant si l'on considère l'état actuel de la réflexion épistémologique contemporaine sur la connaissance que les sciences expérimentales peuvent avoir du réel. L'idée d'un déterminisme absolu régnant dans la nature et que seule l'imperfection de l'esprit humain empêcherait de cerner totalement (1), paradigme scientifique issu de la physique classique depuis le 17° siècle, a été amplement critiqué et dépassé par le modèle d'un déterminisme statistique voire parfois opposé à de l'indéterminisme présent au coeur du réel. La science ne saisirait qu'un "réel voilé" (B. d'Espagnat). Alors comment prétendre dans ces conditions que les techniques, elles-mêmes étant par nature toujours porteuses d'une marge d'imperfection, n'engendreront que des conséquences entièrement maîtrisées alors que la théorie elle-même n'est pas en état de les prévoir?! Il existe en fait un décalage inouï entre les connaissances théoriques des sciences de la nature et leur épistémologie d'une part, et la pratique scientifique financée, orientée par le capitalisme en vue de la domination technique du réel, d'autre part. La réflexion théorique fondamentale est déterministe statistique, probabilitaire, le discours idéologique est déterministe-mécaniste, scientiste, et l'application technique est chaotique, désastreuse sur le plan écologique.

Un débat public avait été lancé en France sur la question ; le Gouvernement l'avait inclus dans le cadre du «Grenelle de l'Environnement» . En 2010,17 villes françaises accueillirent cette consultation populaire censée ouvrir la voie à un examen démocratique et indépendant des applications liées aux Nanotechnologies. Comme le rapporte Julien Teil dans l'un de ses articles, le débat est dès le départ verrouillé par ceux qui ont intérêt que cette technologie soit acceptée par la société. Sous hautes surveillances policières, ces consultations ont été marquées par une forte propagande de lobbys commerciaux et scientifiques qui veulent que la marche vers le «nanomonde» soit irrémédiable.

Selon l'analyse de Julien Teil, «la mise en place de ce débat n'est donc pas un préalable à une concertation populaire. Il semble obéir à d'autres attentes, et n'être qu'un moyen d'obtenir habilement le consentement de la population: seuls les mécanismes de gouvernance peuvent être discutés. L'avis du peuple concernant le développement des nanotechnologies a certes droit de cité mais est en revanche mis à l'écart par l'encadrement inéquitable du débat. Car les nanotechnologies sont déjà là, et le resteront. Il nous est simplement proposé de donner notre avis sur le mode de régulation le plus adapté ainsi que sur les lois qui en découleront». Comme pour le nucléaire ou les OGM, le but n'est pas de donner à la population des outils d'analyse sur le sujet mais de présenter la situation sous le contrôle des experts et des scientifiques (qui sont loin d'être unanimes sur l'aspect anodin de ces technologies. « Nous ne sommes déjà plus tout à fait humains, nous qui abandonnons notre prérogative d'humains (le libre arbitre) à leurs manipulations » déclare le collectif Pièces et Main d'Oeuvre...



NOTE :

1) Le scientifique français, Laplace, avait résumé au début du 19° siècle la conception du déterminisme issu de la physique newtonienne de la façon suivante : une intelligence surhumaine disposant de la connaissance des positions et des forces d'impulsion concernant tous les atomes présents dans l'univers à un instant donné pourrait remonter jusqu'aux causes les plus lointaines ayant engendré la situation présente dans la nature et pourrait légitimement prévoir tout ce qui adviendra dans le futur de celle-ci. Le monde physique est comme une horloge qui a été remontée une fois pour toutes et qui marche automatiquement.

Pour aller plus loin sur le sujet :

Les livres de Pièces et Main d’Oeuvre parus aux éditions de l'Echappée :

- Le téléphone portable, gadget de destruction massive

- RFID : la police totale. Puces intelligentes et mouchardage électronique

- Aujourd’hui le nanomonde. Nanotechnologies : un projet de société totalitaire

- A la recherche du nouvel ennemi. 2001-2025 : rudiments d’histoire contemporaine

Le site du collectif : http://www.piecesetmaindoeuvre.com/

Julien Teil, Le Débat Public sur les nanotechnologies adémocratiques,article disponible sur le site http://www.legrandsoir.info

 

Pièces et Main d’Oeuvre, nanomonde, RFID, nanotechnologies, Julien Teil,

04/07/2012

Un numéro indispensable de la revue Rébellion

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Au sommaire du numéro 53 de la revue Rébellion :

Editorial : Le temps des leurres. 

Culture : Sank'ia, l'épopée barbare de Z. Prilipine. 

Dossier géopolitique 

Entretien avec Aymeric Chauprade : comprendre la Realpolitik. 

L'Union pour la Méditerranée par Julien Teil. 

Obama et l'Impérialisme par Terouga. 

Entretien avec Alexandre Douguine. 

Histoire : Thermidor, le crépuscule de la République par david l'Epée. 

Culture : Entretien avec François Bousquet sur Jean Edern Hallier. 

Livre : les Mémoires Vives d'Alain de Benoist par Thibault Isabel. 

Boyd Rice : Anatomie d'un provocateur.

 

Numéro disponible contre 4 euros à notre adresse :

Rébellion c/o RSE BP 62124 31202 TOULOUSE cedex 02 

29/11/2011

Julien Teil pour Rébellion

Le journaliste d’investigation Julien Teil dénonce les ingérences prétendument humanitaires qui ont menées l'Occident au pillage de la Libye et au massacre de milliers de civils innocents par les troupes de l' OTAN



 

08/09/2010

La Grèce préfigure la Tiers-Mondialisation de l’Europe

Article de  Julien Teil repris du site Mecanopolis. 

La cure d’austérité drastique à laquelle la Grèce est sommée de se soumettre trouve son modèle dans les politiques d’ajustement structurels qui ont été imposées par le FMI aux pays du sud après la crise de la dette déclenchée par la remontée des taux de la Fed en 1982, note l’économiste Bernard Conte. A l’époque, comme aujourd’hui, la véritable difficulté consistait à faire accepter aux peuples de supporter le coût de la crise. Mais depuis lors, les politiques permettant de faire passer ces purges amères ont été peaufinées, prévient-il, rappelant que l’OCDE a rédigé à toutes fins utiles un guide décrivant les stratégies à employer en de telles circonstances. On peut par exemple y lire que « si l’on diminue les dépenses de fonctionnement, il faut veiller à ne pas diminuer la quantité de service, quitte à ce que la qualité baisse. On peut réduire, par exemple, les crédits de fonctionnement aux écoles ou aux universités, mais il serait dangereux de restreindre le nombre d’élèves ou d’étudiants. Les familles réagiront violemment à un refus d’inscription de leurs enfants, mais non à une baisse graduelle de la qualité de l’enseignement. » Cela ne vous évoque rien ?

La Grèce préfigure la Tiers-Mondialisation de l’Europe

 La Grèce est très endettée et la finance internationale attaque ce maillon faible de la zone euro pour tester la cohésion de l’ensemble, avant éventuellement de spéculer contre d’autres pays pour générer d’énormes profits. La réaction à cette attaque devrait entraîner la mise « sous tutelle » de la Grèce par la Commission européenne, par ses partenaires au sein de la zone euro et par un Fonds monétaire européen. A l’instar des pays du Tiers-Monde à partir des années 1980, la Grèce va se voir imposer un programme d’ajustement économique et social drastique, traduisant sa Tiers-Mondialisation qui préfigure sans doute celle d’autres pays européens.

 La Grèce enregistre des déficits publics importants qui doivent être financés par l’emprunt dont le cumul accroît le volume de la dette de l’État. Pour rétablir la confiance de ses bailleurs de fonds privés, le pays doit réduire son endettement. A défaut, la prime de « risque », réclamée par les bailleurs, qui s’ajoute au taux d’intérêt « normal » pourrait conduire à un taux usuraire. Georges Papandréou n’a pas le choix, il doit impérativement s’endetter moins, voire diminuer le volume de la dette grecque.

 

 

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L’exemple du Tiers-Monde en 1982

 La situation de la Grèce, liée au « surendettement », n’est pas sans rappeler celle des pays du Tiers-Monde lors de la crise de la dette de 1982. En effet, pour pouvoir faire face à leurs obligations financières, les pays du Sud, en quasi cessation de paiements, ont été « aidés » par le FMI et par la Banque mondiale. Ces institutions ont accordé des prêts aux pays du Sud afin qu’ils puissent rembourser leurs banques créancières. Lesdites banques ont ainsi pu transférer au FMI et à la Banque mondiale une bonne partie de leurs créances « pourries » (ou « actifs toxiques » en langage politiquement correct). En contrepartie, les pays « aidés » se sont vus imposer des programmes d’ajustement structurel, traduction du consensus de Washington |1| d’inspiration néolibérale monétariste. A travers l’application de ses dix commandements, le consensus de Washington vise à permettre aux pays sous ajustement de recouvrer la capacité d’assurer le service (principal + intérêts) de leur dette extérieure. Il faut, à n’importe quel prix, dégager des fonds pour payer les créanciers.

 

Réduire le déficit de l’Etat

 

Cette démarche passe par la compression des dépenses et l’augmentation des recettes de l’État. L’action sur la dépense publique implique la réduction :

 - de la masse salariale de la fonction publique (baisse des effectifs et/ou du niveau des traitements)

- des autres dépenses de fonctionnement (éducation, social…)

- des subventions (services publics, associations…)

- des investissements publics (infrastructures…)

 

L’augmentation des recettes réclame :

 - l’alourdissement de la fiscalité

- la privatisation de services publics rentables (eau, électricité…)

Plus généralement, la croissance est censée élargir les marges de manœuvre par le développement de l’activité économique qui, mécaniquement, augmente les recettes de l’Etat. La croissance peut être tirée par les exportations si la production nationale gagne en compétitivité externe, grâce à la dévaluation de la monnaie nationale, ou, si cette opération se révèle impossible, par la désinflation compétitive (comme pour le franc CFA avant la dévaluation de 1994 |2| ) qui consiste à obtenir un taux d’inflation plus faible que celui des pays concurrents. La philosophie des programmes d’ajustement est, in fine, d’une part, de tenter d’augmenter la production locale de surplus (par la croissance) et, d’autre part, de réduire la consommation locale dudit surplus afin de l’exporter. En aucun cas, il s’agissait de se préoccuper du bien-être des populations.

 

Un bilan des ajustements dramatique

Malgré de nombreuses études financées par la Banque mondiale et le FMI, tendant à démontrer que l’ajustement générait de la croissance et, par effet de ruissellement, bénéficiait même aux pauvres. Les conséquences sociales négatives ont été rapidement mises à jour et dénoncées |3| . Ainsi, la pauvreté s’est accrue et les classes moyennes préexistantes ont été paupérisées. Les populations du Sud ont subi les conséquences funestes de l’ajustement pour rembourser des dettes dont elles n’avaient que peu profité.

 La Grèce « inaugure » les politiques d’ajustement en Europe

 Jusqu’à présent, l’ajustement néolibéral imposé était réservé aux pays « non développés ». La Grèce inaugure le processus de Tiers-Mondialisation de l’Europe en passant sous les fourches caudines de « l’ajustement ». A l’instar des pays du Tiers-Monde, il s’agit de dégager des marges de manœuvre budgétaires pour rembourser la dette extérieure à travers la réduction du périmètre de l’État, la privatisation, la dérégulation, les coupes claires dans les budgets de santé, d’éducation…

 

La Grèce est un test pour l’Europe néolibérale

 L’inconnue reste la réaction populaire. La population va-t-elle accepter l’austérité ? Déjà, des grèves et des manifestations se déroulent. Hier, le 11 mars, plus de 100 000 personnes manifestaient dans les rues d’Athènes. Au Portugal et en Espagne, la mobilisation sociale s’opère. L’ajustement va-t-il buter sur l’obstacle social ? D’autant plus que les conséquences des troubles sociaux pourraient atteindre le domaine politique avec l’émergence et l’éventuelle arrivée au pouvoir de forces politiques situées en-dehors du « consensus » : droite « molle » – gauche « caviar ». Mais, là aussi, les élites complices peuvent trouver l’inspiration dans l’expérience du Tiers-Monde pour faire « passer » les réformes.

 

La faisabilité politique de l’ajustement

 Dans les années 1990, de nombreux travaux ont été menés, au sein de l’OCDE, sur la faisabilité politique de l’ajustement néolibéral |4|. Christian Morrisson prévient : « l’application de programmes d’ajustement dans des dizaines de pays pendant les années 1980 a montré que l’on avait négligé la dimension politique de l’ajustement. Sous la pression de grèves, de manifestations, voire d’émeutes, plusieurs gouvernements ont été obligés d’interrompre ou d’amputer sévèrement leurs programmes » (p. 6). Il convient de minimiser les risques et adopter une stratégie politique adéquate.

 

Prendre des mesures politiquement et socialement peu risquées

A partir de plusieurs études-pays, Christian Morrisson met en avant « l’intérêt politique de certaines mesures [...] : une politique monétaire restrictive, des coupures brutales de l’investissement public ou une réduction des dépenses de fonctionnement ne font prendre aucun risque à un gouvernement. Cela ne signifie pas que ces mesures n’ont pas des conséquences économiques ou sociales négatives : la chute des investissements publics ralentit la croissance pour les années à venir et met sur-le-champ des milliers d’ouvriers du bâtiment au chômage, sans allocation. Mais nous raisonnons ici en fonction d’un seul critère : minimiser les risques de troubles » (p. 16). Peu importe, « dans la réalité, les entreprises du bâtiment souffrent beaucoup de telles coupures [dans les investissements publics] qui multiplient les faillites et les licenciements. Mais ce secteur, composé surtout de petites et moyennes entreprises, n’a quasiment aucun poids politique » (p.17). « La réduction des salaires et de l’emploi dans l’administration et dans les entreprises parapubliques figure, habituellement, parmi les principales mesures des programmes [d’ajustement] » (p. 29). Selon Christian Morrisson, cette mesure est « moins dangereuse politiquement » que d’autres « et elle touche les classes moyennes plutôt que les pauvres » (p. 29). En cas de troubles (grèves…), « le gouvernement a toutefois les moyens de faire appel au pragmatisme des fonctionnaires. Il peut, par exemple, expliquer que, le FMI imposant une baisse de 20 pour cent de la masse salariale, le seul choix possible est de licencier ou de réduire les salaires et qu’il préfère la seconde solution dans l’intérêt de tous. Les expériences de plusieurs gouvernements africains montrent que ce discours peut être entendu » (p. 29). Ce qui est vrai en Afrique l’est certainement sous d’autres cieux.

 Agir sur la qualité des services publics

 « Si l’on diminue les dépenses de fonctionnement, il faut veiller à ne pas diminuer la quantité de service, quitte à ce que la qualité baisse. On peut réduire, par exemple, les crédits de fonctionnement aux écoles ou aux universités, mais il serait dangereux de restreindre le nombre d’élèves ou d’étudiants. Les familles réagiront violemment à un refus d’inscription de leurs enfants, mais non à une baisse graduelle de la qualité de l’enseignement et l’école peut progressivement et ponctuellement obtenir une contribution des familles, ou supprimer telle activité. Cela se fait au coup par coup, dans une école mais non dans l’établissement voisin, de telle sorte que l’on évite un mécontentement général de la population » (p. 30). Sans commentaire !

 

Diviser et opposer pour imposer

 « Un gouvernement peut difficilement [ajuster] contre la volonté de l’opinion publique dans son ensemble. Il doit se ménager le soutien d’une partie de l’opinion, au besoin en pénalisant davantage certains groupes. En ce sens, un programme qui toucherait de façon égale tous les groupes (c’est-à-dire qui serait neutre du point de vue social) serait plus difficile à appliquer qu’un programme discriminatoire, faisant supporter l’ajustement à certains groupes et épargnant les autres pour qu’ils soutiennent le gouvernement. » (p. 17). Comme « la plupart des réformes frappent certains groupes tout en bénéficiant à d’autres, [...] un gouvernement peut toujours s’appuyer sur la coalition des groupes gagnants contre les perdants » (p. 18). Il faut donc diviser et opposer pour imposer.

 

Un régime « dictatorial » serait idéal pour imposer les réformes

 « Une comparaison pour les pays d’Amérique latine entre des régimes démocratiques comme la Colombie, l’Équateur, le Pérou, et des régimes militaires, comme l’Argentine et le Chili, en 1981-82, montre que les troubles sont plus rares lorsque le régime est militaire [...] La comparaison entre les deux expériences de l’Argentine sous un régime militaire (en 1981) et en démocratie (1987) est parlante : le niveau de protestation a été trois fois plus élevé en 1987 et il y a eu beaucoup plus de manifestations » (p. 12). Ainsi, un régime dur serait idéal pour imposer les réformes. Le néolibéralisme serait-il entrain de déraper ?

Au total, la Grèce préfigure bien la Tiers-Mondialisation de l’Europe.

 

Site internet : www.mecanopolis.org

Notes :

 Bernard Conte, est l’auteur du livre La Tiers-Mondialisation de la planète CADTM

|2| Bernard Conte, Dévaluation du Franc CFA et équilibre des paiements courants, DT n°20, C.E.D., Bordeaux, 1997

|3| Voir par exemple : Cornia, Giovanni Andrea, Richard Jolly, and Frances Stewart. Adjustment with a human face. Protecting the vulnerable and promoting growth vol 1. Oxford : Clarendon Press, 1987

|4| Cf. Christian Morrisson, La faisabilité politique de l’ajustement, Paris, Centre de développement de l’OCDE, Cahier de politique économique n° 13, 1996. (jusqu’à la dernière note, les numéros de page des citations se réfèrent au présent document).

 

23/08/2010

Entretien avec Julien Teil, ONG : L'impérialisme humanitaire à l'œuvre

Entretien paru dans le numéro 41, Mars/Avril 2010, de Rébellion

 

01.jpgRébellion/Vous avez travaillé dans le monde des Organisations Non-Gouvernementales ? Quels enseignements avez-vous tiré de leur mode de fonctionnement parfois opaque ?

Julien Teil/Je n’ai pas travaillé au sein d’ONG mais pour une société spécialisée dans la collecte de fonds pour de grandes ONG. Suite à cela, une réflexion sur l’essence des ONG et leur instrumentalisation m’apparut plus que nécessaire. Tout d’abord, il faut prendre le soin de préciser quelques éléments : Les ONG, accréditées auprès de l’ONU exercent ce qu’on appelle un soft power, c’est-à-dire qu’elles influencent des instances décisionnaires à l’échelle mondiale. Pour certains, c’est une nouvelle forme de démocratie. Pourtant, les ONG ne sont pas élues, et leurs propres modes de gouvernance ne sont pas toujours démocratiques. A cela il faut ajouter les liens qu’ont certaines grandes ONG avec des transnationales qui animent en parallèle de puissants lobbys. Par ailleurs, elles jouent parfois un rôle géopolitique, principalement par l’intermédiaire des grands bailleurs de fonds comme ECHO pour l’union européenne et USAID pour les Etats-Unis. Enfin, parmi les ONG accréditées par l’ONU, beaucoup sont en réalité des fondations. Celles-ci sont souvent issues des grandes familles philanthropes, de multinationales et de banques. On y trouve aussi des instituts, des think-tanks, etc. ; bref, tout ce qui peut être qualifié de « société civile ». Du fait de tous ces éléments, il est difficile de cataloguer les ONG en général, et l’étude de leur fonctionnement est souvent rude et complexe.

 

Leur  financement  est souvent difficile à établir. Les grandes multinationales interviennent-elles auprès des ONG ?

Oui, elles interviennent, mais pas nécessairement sous forme de financements, bien que cela arrive ceux-ci sont en général peu importants par rapport au total des fonds levés par les ONG. Par contre, les partenariats entre ONG et multinationales sont courants. Les grandes multinationales aux pratiques contestées, notamment dans les PED, peuvent ainsi labelliser leur image. C’est une sorte de greenwashing. En règle générale, une multinationale agit souvent par intérêt, tout financement et partenariat pose donc des questions sur la légitimité d’une ONG, d’autant plus lorsque la multinationale en question a des intérêts dans les pays ou travaille l’ONG. Enfin, elles ont la possibilité d’intervenir indirectement au travers des personnes qui ont des postes importants au sein des ONG. Un bref aperçu de leurs parcours montre qu’elles ont parfois servi ces multinationales, aujourd’hui partenaires de leur ONG.

 

L'humanitaire est devenu un enjeu géopolitique. Pouvez-vous nous donner des exemples du détournement de cette idée dans des buts très éloignés de l'aide aux pays du Sud ?

Il y a un exemple très parlant au sujet de l’actualité. C’est avec prudence que je l’aborde, car encore une fois il s’agit de quelques ONG et fondations et qu’il est très difficile à saisir. Certaines ONG entendent proposer une « Robin Hood Tax » ; celle-ci étant la continuité des revendications associatives suite à « l’échec de Copenhague ».

Mais avant tout, quelques précisions sont nécessaires. Beaucoup d’ONG estiment que le réchauffement climatique anthropique aura des conséquences sur l'accélération de l'assèchement des terres africaines, et donc de l'appauvrissement des cultures vivrières. C'est en tout cas ce que prétend par exemple Action Contre la Faim.

En parallèle, comme je l'ai expliqué dans mon article " Les liaisons incestueuses des ONG avec les Etats et les transnationales", ces fondations et ONG participent à des programmes financés par la Howard Buffet Foundation , dont le Global Water Initiative est le pilier central. L'IIED, partenaire important du Global Water Initiative, a d'ailleurs publié les détails de l'opération sur son site internet.

Le site du journal Le Monde a quant à lui publié la liste des ONG impliquées dans la « Robin Hood Tax ». On y trouve Oxfam et Greenpeace, des organismes hautement impliqués dans le sommet de Copenhague, Oxfam étant aussi partenaire du Global Water Initiative. Notons que ces organismes n’ont jamais émis le moindre doute suite à l’affaire du Climatgate, suivie de la démission du président du CLU (Climat Research Unit), ni au sujet de l’inexistence d’un consensus sur la question de la théorie du réchauffement climatique anthropique.

Parmi les soutiens du projet de la « Robin Hood Tax », on retrouve aussi bien des politiques (Gordon Brown, Nicolas Sarkozy) que Warren Buffet. La famille Buffet est impliquée au travers de ses fondations dans de nombreux programmes de solidarité et a des intérêts dans les solutions dites "écologiques" : voitures électriques, bioéthanol, etc. ; mais aussi dans les Organismes Génétiquement Modifiés (OGM) et leur distribution.

Bien que la taxe proposée par ces ONG et représentants du pouvoir politique et économique propose de taxer les transactions financières, il faut s'interroger sur les secteurs dans lesquels les fonds seront afférés. Il est spécialement question selon Oxfam de « réduire la pauvreté à travers le monde et d’aider les pays pauvres à s’adapter au changement climatique ».  C'est donc en toute prudence que je décide d'indiquer les instituts et organismes impliqués dans l’élaboration de cette taxe. Il est donc légitime, au vu de l'histoire et des implications de ces organismes, de s'interroger sur leur réelle ambition.

Par ailleurs, les réseaux occultes de solidarité de la Françafrique, tels ceux de Charles Pasqua avec Coopération 92, et ceux de Jacques Attali avec Planet Finance, ont montré que certains réseaux pouvaient interférer dans l'ambition humanitaire affichée, et en particulier en Afrique. C'est aussi ce que l'on constate dans le cas de la loi Oudin-Santini. Parfois ces organismes sont crées à des fins qui n'ont rien à voir avec la solidarité internationale, ou sont utilisés par exemple dans l'affaire de l'Angolagate à des fins criminelles.

 

Pour comprendre la situation actuelle, il convient de se référer au passé. Celui-ci comporte de nombreuses analogies avec la situation présente. Pour ce faire, la lecture du livre " Pétrole une guerre d’un siècle, l’ordre mondial anglo-américain ", de William Engdahl, (en particulier les pages 168-172) est particulièrement intéressante. Celui-ci montre comment, il y a déjà des décennies, ces problématiques de ressources énergétiques et vitales donnaient lieu aux accointances les plus douteuses. Ces réalités questionnent sur la nature du sommet de Copenhague, et invitent à s'interroger sur la voie dans laquelle s'engagent ses architectes. Il se pourrait que ce sommet mondial reflète également les combats pour la gouvernance du vivant et des futures énergies. Et, on ne peut nier que ces domaines sont en particulier importants pour les intérêts américains, qui du fait de la crise économique sont en perte de vitesse. D'ailleurs l'administration U.S est de longue date impliquée dans ces pratiques par l'intermédiaire de fondations, de think-tanks et d'ONG. C'est donc encore une fois, une réalité géopolitique qui pourrait, en partie, expliquer la voie dans laquelle s'engagent ces ONG, fondations, et gouvernements au nom de l'écologie.

 

 

 

 

Comment les ONG servent-elles les intérêts des Etats occidentaux ? L' « impérialisme humanitaire »  est-il une nouvelle forme de la domination des grandes puissances ?

Les ONG peuvent servir les intérêts des Etats occidentaux pour la simple raison qu’elles sont transnationales. Elles travaillent partout, et remontent une quantité d’information à travers leurs études et les bilans de leurs pratiques. Les Etats occidentaux, quant à eux, ont toujours cherché à faire perdurer le colonialisme, notamment par l’intermédiaire de leurs multinationales (comme Danone ou Lafarge par exemple). Il est évident que ces sources humanitaires sont pour eux du pain béni, et permettent de poursuivre les processus coloniaux en ayant nombre d’informations à disposition. En ce qui concerne le colonialisme, seules les formes changent, mais le but reste le même : privatiser les biens publics, les terres, les ressources. Les ONG assoient nécessairement l’hégémonie des pays occidentaux, tout comme le font le FMI et la Banque Mondiale.

La seule différence que l’on peut noter en comparaison avec le passé se résume par le fait que ces « grandes puissances » ont tendance à devenir privées, alors qu’auparavant elles étaient étatiques. Même si les pratiques des Etats occidentaux étaient auparavant faites au nom des peuples souverains, avec leur argent et sans leur accord, il s’agissait de renforcer l’hégémonie d’une Nation, aujourd’hui il s’agit de renforcer celle des multinationales. Ces deux pratiques doivent être condamnées mais ce constat n’est pas anodin. Ce phénomène va de pair avec la mutation des politiques nationales vers une gouvernance mondiale anti-démocratique. C’est d’ailleurs cette mutation que Francois Xavier Verschave décrivait dans son livre «  de la Françafrique à la Mafiafrique » lorsqu’il expliquait que certains grands industriels n’ont plus besoin d’un Etat pour conduire leurs pratiques prédatrices en Afrique. Néanmoins, l’impérialisme humanitaire revêt aussi une forme géopolitique, lorsqu’il administre un pays pour les intérêts d’un autre pays par exemple, c’est notamment ce qu’on peut observer en Haïti. L’intervention des armées lors d’opérations humanitaires se généralise, ce mélange des genres est regrettable et en dit long sur les ambitions à long terme.

 

Que pensez-vous du modèle de l'aide au développement ? N'y a-t-il pas une volonté de rendre dépendant l'ensemble des pays de la planète, des Organisations Economiques Internationales (comme le FMI ) ?

Tout à fait. A ce sujet, je vous renvoie aux travaux du comité d’annulation de la dette du tiers monde. Il est certain que les programmes prodigués par la banque mondiale et le FMI entretiennent dans un premier temps le maintien de la pauvreté, la perte de la souveraineté alimentaire et de toute autonomie dans les PED. Dans un second temps, ces modèles de gouvernance nés sous prétexte de réajustement économique et au nom d’une soi-disant nécessaire croissance mondiale, vont être visiblement utilisés dans les pays dits développés qui souffrent actuellement de la crise économique. L’Allemagne a d’ailleurs appelé à la création d’un FME (Fonds Monétaire Européen). Que va-t-il se passer ? La Grèce va-t-elle être vendue aux multinationales comme ce fut le cas pour l’Argentine ?

L’aide au développement est, de plus, un concept hiérarchisant, qui mériterait quelques critiques. Les DSRP (documents stratégiques de réduction de la pauvreté) qui ont suivi les programmes d’ajustements structurels, prétendent intégrer les peuples dans les décisions. Mais ils ne font que permettre la pérennité d’un néocolonialisme en perpétuelle mutation, là est la dite stratégie. Cette stratégie ne pourrait exister sans le très contestable rayonnement de la culture occidentale, qui lui même est impérial et profondément ethnocentriste.

 

La mondialisation capitaliste se dirige vers la mise en place d'une gouvernance mondiale. Quelles furent les étapes de sa mise en place et quels objectifs vise-t-elle ?

Il est difficile de répondre à cette question. Le mondialisme n’est pas seulement une conséquence de la mondialisation mais aussi une idéologie. Pierre Hillard a récemment publié un article intitulé « histoire du nouvel ordre mondial » qui décrit l’ensemble des processus mis en place par les grands princes du mondialisme. Il y a de plus, une mystique mondialiste assumée par ses acteurs. Elle est difficile à interpréter, mais ses objectifs sont clairement énoncés. Les processus sont longs et peuvent prendre différentes formes.

Jacques Attali décrit dans «  Une brève histoire de l’avenir » la perspective de cette gouvernance mondiale. Je ne pense pas qu’il se trompe, les ambitions qu’il révèle sont d’ailleurs en synchronicité avec ce à quoi nous assistons de nos jours.

 

Il serait donc question d’une gouvernance mondiale, au sein de laquelle chaque être humain consommerait, penserait et agirait de la même manière et uniformément sur le globe. Cela passe évidemment par l’abolition des souverainetés, pas seulement étatiques, mais aussi alimentaires, ce qui à mon sens représente un énorme danger. L’intervention des assurances semble également inéluctable pour aboutir à un tel système : chaque homme ayant droit selon des critères socio-économiques, à une alimentation de telle catégorie, une santé de telle catégorie, une éducation de telle catégorie, etc. ; le tout régi par des assurances mondiales sous le contrôle de divers ministères et organismes mondiaux. Nous vivons déjà dans un tel système mais il n’est pas encore totalement verrouillé. Le but est naturellement d’aboutir à un système profondément antidémocratique puisque calqué sur la gouvernance européenne, qui n’est autre que la gouvernance des lobbys. À ce propos, seul 40% des agences de lobbyistes sont inscrites sur le registre bruxellois.

 

L’opacité de la gouvernance européenne, pourrait certainement se retrouver dans une gouvernance mondiale institutionnalisée, et ses institutions ne seraient plus seulement interventionnistes mais exerceraient une primauté sur les droits nationaux et les constitutions. Cela s’accompagnera bien entendu, comme l’a montré Medvedev en présentant un prototype de pièce mondiale lors du sommet du G20 à l’Aquila, d’une monnaie mondiale. La crise actuelle sert en outre indiscutablement l’accélération de l’abolition des monnaies nationales au profit de l’émergence de nouvelles monnaies continentales qui convergeront vers la monnaie mondiale. C’est du moins ce qu’indiquent les écrits des laboratoires de pensée élitistes, notamment Foreign Affairs, la revue du CFR. Il faut noter que l’émission de cette monnaie se fera sans aucun doute par les banques privées, ce qui pourrait détruire le principe même de souveraineté, et de facto annoncer la fin de la démocratie. C’est d’ailleurs ce qu’a permis l’article 104 du traité de Maastricht en Europe: mettre une fin définitive à l’indépendance des peuples face aux banques privées, entretenir la dette des pays européens, pendant que le FMI et la Banque Mondiale construisaient celle des PED. Notons que ces dettes coloniales et antidémocratiques n’ont aucun sens et aucune légitimité au regard de nombreuses constitutions.

 

 

La question de la « FrançAfrique » est toujours d'actualité pour vous.  Où en sont  les rapports entre les gouvernements français et les Etats africains ? Les « réseaux africains » des partis politiques français de Gauche comme Droite existent-ils encore ?

Dresser un tableau d’actualité des relations franco-africaines serait un travail long et pénible. Je vous renvoie donc aux travaux de l’association Survie. Samuel Foutoyet a publié fin 2008 un parfait résumé de la situation dans son ouvrage « Nicolas Sarkozy ou la Françafrique décomplexée ». Il faut bien comprendre que sous Sarkozy nous avons affaire à la branche affairiste de la Françafrique, des réseaux Pasqua et donc de ceux de la Corse. Les réseaux africains des partis politiques français subsistent, mais il est certain que des réseaux chinois, israéliens, américains, iraniens et libanais, etc., sont engagés dans la « conquête de l’Afrique ». De plus, comme l’a expliqué Verschave, les multinationales sont elles aussi de plus en plus présentes et n’agissent pas au nom d’un pays, mais simplement au nom du profit. Cela est à mettre en rapport avec la mutation des relations internationales vers une gouvernance mondiale dirigée par des multinationales et des banques privées.

 

 

La résistance à la mondialisation a pris diverses formes en Europe. Comment jugez-vous le bilan de l'altermondialisme ? La crise de ce mouvement, longtemps représenté par ATTAC, est-elle révélatrice de ses faiblesses initiales (mélange de réformisme et d'analyses dépassées) ?

Ce n’est que mon avis mais je vais rester général : ces organisations proposent de traiter les conséquences du système en place. Elles ne proposent aucunement de le démanteler en s’attaquant à sa base. Elles ne font finalement que rationaliser l’expression des maux de la société, lui ôtant toute sa charge vindicative. Elles se présentent pour la plupart en tant que société civile, mais elles ne sont pas élues. En somme, elles veulent sauver le système, l’économie, la démocratie ; en bref sauver des choses qui ont depuis longtemps fait l’aveu de leur propre inconsistance.<