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04/07/2012

Un numéro indispensable de la revue Rébellion

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Au sommaire du numéro 53 de la revue Rébellion :

Editorial : Le temps des leurres. 

Culture : Sank'ia, l'épopée barbare de Z. Prilipine. 

Dossier géopolitique 

Entretien avec Aymeric Chauprade : comprendre la Realpolitik. 

L'Union pour la Méditerranée par Julien Teil. 

Obama et l'Impérialisme par Terouga. 

Entretien avec Alexandre Douguine. 

Histoire : Thermidor, le crépuscule de la République par david l'Epée. 

Culture : Entretien avec François Bousquet sur Jean Edern Hallier. 

Livre : les Mémoires Vives d'Alain de Benoist par Thibault Isabel. 

Boyd Rice : Anatomie d'un provocateur.

 

Numéro disponible contre 4 euros à notre adresse :

Rébellion c/o RSE BP 62124 31202 TOULOUSE cedex 02 

31/08/2009

Interview de Denis Gorteau à propos de son livre La guerre en Irak est-elle finie ?

Denis Gorteau. Auteur d’analyses géopolitiques depuis longtemps, et, ayant déjà publié un roman racontant l’invasion de l’Irak en 2003. Il publie en mai un livre universitaire sur les tenants et les aboutissants de la guerre en Irak. Une première ébauche d’une histoire complète de ce conflit qui, selon D. Gorteau, a préfiguré le déclin des Etats-Unis comme puissance mondiale.

QUE FAIRE : Commençons par la fin ! La guerre en Irak est-elle finie ?

Denis Gorteau : Poser la question c’est y répondre : même si la situation a cessé de se dégrader, l’invasion de 2003 n’a pas fini de bouleverser le pays et de meurtrir ses habitants, après les pires années de l’occupation en 2005-2007, la relative amélioration de 2008 marque une sorte de  » pause « , mais rien, absolument rien n’est réglé.

QUE FAIRE : A qui s’adresse votre livre ?

Denis Gorteau : C’est un livre généraliste, toutes les personnes intéressées par le Proche-Orient peut y trouver intérêt.

J’explique l’histoire du Moyen-Orient et les sources de conflits. C’est donc un livre historique à la fois chronologique et thématique qui traite de questions aussi diverses que l’islamisme, le clanisme, le nationalisme arabe, etc.

QUE FAIRE : Le contrôle du pétrole fut-il la seule cause de l’invasion américaine ?

Denis Gorteau : Non, loin de là. Pour Bush lui-même il s’agissait de renverser un dictateur et d’apparaître positivement alors même que sa  » guerre contre le terrorisme  » était en échec. Pour le vice-président Cheney et Rumsfeld, icônes du néo-conservatisme, il s’agissait plutôt de moderniser par la force le monde arabe ; pour les libéraux la guerre devait ouvrir les marchés protégés des pays du Proche-Orient ; pour le lobby pro israélien le but était de renverser S. Hussein, figure du nationalisme arabe, etc. Au sein de l’oligarchie us les raisons ne manquaient pas, y compris du côté des Démocrates qui furent favorables à la guerre.

QUE FAIRE : B. Obama s’y opposa tout de même, non ?

Denis Gorteau : C’est juste, mais en 2003, c’était un élu local parmi d’autres. Un inconnu, courageux, mais isolé même si en 2008 il fit campagne sur la question du retrait.

QUE FAIRE : Tiendra-t-il parole ?

Denis Gorteau : A dire vrai, dès 2007, les Américains pensent à se retirer partiellement tout en négociant des traités très avantageux avec leurs hommes à Bagdad. C’est le sens de  » l’accord de sécurité  » signé en décembre 2008 : alors que l’occupation pure et simple a été un désastre politique et militaire, il est plus simple d’acheter des complicités et de sous-traiter le maintien d’un ordre favorable à l’installation de bases américaines permanentes. C’est ainsi que les tribus sunnites ont été  » retournées « .

Nous allons vers un cantonnement de gros contingents de soldats us qui resteront en Irak au cas où. Dans le pays, leurs supplétifs feront ce qu’en leur dira de faire contre arguments sonnants et trébuchants… Cela rappelle la Corée du Sud des années 70.

QUE FAIRE : qui a gagné la guerre de 2003 ?

Denis Gorteau : Pour le moment personne, comme la guerre Iran / Irak des années 80, il n’y a que des vaincus : les occupants se sont fourvoyés et sont haïs à un degrés inimaginable. Bush a nourri pour plusieurs décennies le terrorisme et l’islamisme le plus terrible. Les Chiites pro iraniens ont gagnés en influence, mais au prix d’une guerre civile avec les Sunnites qui a fait des milliers de morts en 2005-2006. Et le  » gouvernement  » actuel de Maliki ne tient qu’en jouant subtilement entre des forces contraires (Washington, Téhéran, etc.) et au prix d’une militarisation de la vie politique.

QUE FAIRE : Le pays survivra-t-il à cette guerre ?

Denis Gorteau : Si l’Irak avait dû disparaître cela aurait déjà été le cas, mais comme en Bosnie le territoire est très durablement divisé en communautés, régions et réseaux concurrents et violents. La question du Kurdistan n’a, par exemple, pas finit de se poser.

QUE FAIRE : C’est à dire ?

Denis Gorteau : Redoutant les Chiites pro iraniens et en bute aux Sunnites chassés du pouvoir en 2003, les Américains se sont appuyés sur les chefs kurdes, qui, depuis la chute de S. Hussein sont complètement libres dans le nord de l’Irak, périodiquement ils agitent la menace d’une indépendance du Kurdistan et revendiquent des territoires mixtes où les Kurdes ne sont pas les seuls habitants (à Kirkouk notamment). Indépendants de fait et tolérés par les Occidentaux les Kurdes sont dans le viseur de la Turquie qui a, plusieurs fois, bombardé et envahi les zones où se cachent les Kurdes séparatistes… de Turquie ! C’est là une zone de tension vive et durable.

QUE FAIRE : votre livre parle aussi du reste du Proche-Orient. Pourquoi ?

Denis Gorteau : La guerre en Irak ne se limite pas à la seule Mésopotamie, les pays frontaliers ont été concernés, ne serait-ce qu’avec la question des réfugiés : plus de 4 millions d’Irakiens ont fuient leur pays. C’est l’une des plus grande migration humanitaire des dernières décennies : la Jordanie et la Syrie, pays pauvres, ont été obligés de gérer cet exode.

Mais la guerre de 2003 a aussi redistribué les cartes politiques : l’Iran est devenu un pays incontournable dans la région, avant, S. Hussein servait de contre poids. Nous n’en sommes plus là. Et que dire d’Israël, acteur indirect de cette guerre puisqu’il s’agissait aussi de briser toute velléité de créer un Etat capable de rivaliser avec Tel-Aviv.

QUE FAIRE : quel est le bilan de la guerre ?

Denis Gorteau : Le bilan est lourd, triste et malheureusement incomplet : on estime à plus de 500.000 le nombre de morts (directs ou indirects) dus à cette invasion, mais la société irakienne a aussi éclaté en communautés rivales, dont les minorités comme les Chrétiens, les Yésidis ou les Turcomans font les frais. Il y a aussi les millions de réfugiés ou les millions de jeunes sans écoles ou les Femmes qui ont perdu leur statut relativement moderne des années 50-60, etc.

Côté us c’est sinistre : plus de 4.000 soldats morts en Irak, des dizaines de milliers de blessés définitifs et des centaines de milliers d’ex soldats perturbés mentalement.

Et que dire des crimes de guerre assez nombreux dont on parle peu mais qui reviendront, tôt ou tard, dans la conscience américaine.

B. Obama fera peut-être aussi le ménage dans les affaires de corruption qui ont enrichi des multinationales américaines, il s’agit de plusieurs milliards de dollars ! Rien de moins. La guerre de 2003 c’est aussi ça : le  » casse du siècle  » au détriment des civils irakiens et des citoyens états-uniens.

QUE FAIRE : les Irakiens ne sont-ils pas soulagés d’être débarrassé de S. Hussein ?

Denis Gorteau : Drôle de question car si les Irakiens ne subissent plus la tyrannie de S. Hussein, ils subissent bien pire ! Jamais le pays n’a autant souffert que de 2003 à aujourd’hui. Sans compter l’embargo de l’ONU qui a laminé le pays à partir de 1990.

De plus, sa liquidation en décembre 2006 a été si scandaleuse qu’elle a éclipsé ses crimes. Crimes à remettre dans le contexte du pays alors soumis à toutes les pressions (kurdes, iraniennes, etc.). N’oublions pas non plus que S. Hussein avait hissé son pays au niveau de développement du Portugal dans les années 80.

QUE FAIRE : En février 2009 Sarkozy a fait un voyage en Irak, pourquoi ?

Denis Gorteau : Son ministre Kouchner l’avait précédé, c’était un partisan de la guerre américaine, Sarkozy a toujours été lié aux réseaux Bush, même s’il a été élu trop tard par rapport à l’invasion, c’est un soutien peu subtile de Washington : renforts français en Afghanistan, retour total de la France dans l’OTAN, etc. Les signes ne trompent pas. Le voyage à Bagdad s’inscrit dans cette politique atlantiste aux antipodes de celle du général de Gaulle. C’est plus inquiétant qu’autre chose car la France a bien peu à gagner, surtout pas de contrats tous monopolisés par les USA. Alors que les Français d’origine maghrébine sont globalement intégrés, il est maladroit et dangereux de jouer les caniches des Etats-Unis, même dirigés par B. Obama.

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